mercredi 17 septembre 2008

Robocop


«Robocop »... quel titre de film idiot! Pas étonnant qu'aucun réalisateur ne voulait lire le script...Même Paul Verhoeven, qui venait de terminer son remarqué « la chair et le sang » jeta le scénar par terre en refusant d'être associé à ce qui se prédisait comme une grosse bouse science fictionnesque. C'est sa femme qui, après avoir lu le scénario, plus profond qu'il n'y paraît à première vue, qui le persuade de s'attaquer au projet.
N 'étant pas un grand amateur de SF mais limité dans ses choix professionnels, Paul Verhoeven est malgré tout séduit par la violence indissociable du film et décide de le réaliser.
Sorti peu de temps après « Terminator », le film ne souffre pourtant d'aucune comparaison et ramasse le paquet au box offixe, comme quoi l'intuition féminine, ça a du bon^^!
Pour les rares qui ne connaissent pas le film, il s'agit d'un flic (Peter Weller) transformé en cyborg inexpressif suite à une série de blessures mortelles et qui va faire régner l'ordre sur la ville. Mais les souvenirs vont reprendre le dessus...
Dans la lignée directe de « Blade Runner », le film dépeint une vision assez terrifiante de l'avenir où les criminels règnent sur une ville tentaculaire et oppressante. Les hauts dirigeants bien planqués en haut de leurs immeubles imprenables se la coulent douce alors que l'insécurité grandissante s'abat dans les rues.
Robocop est donc le messie tant attendu qui va nettoyer la ville à coups de balles redemptrices. On pense évidemment à « Judge Dredd » lorsque le héros débarque dans un entrepôt de drogues en liquidant ses ennemis un par un sans broncher.

Doté d'une esthétique à mi chemin entre le comic (pour l'ambiance quasi cyberpunk et l'ultraviolence) et le manga (le design des robots), le film développe une esthétique remarquable porté par une photographie et un montage impeccables. Rien à redire sur le découpage des scènes! Plans séquences, caméra qui figure le visage de Robocop ou fusillades rapides, Verhoeven maîtrise son oeuvre de bout en bout!
Mais que serait le film sans son robot?
La conception du costume demanda à Rob Bottin (le créateur de « la chose » de Carpenter) et à son équipe 6 mois de travail pour aboutir à un robot musclé et gracieux loin du concept « statue vivante ».
De plus Peter Weller a du subir une longue préparationde mime pour se mettre dans sa peau.Le résultat est indéniable: Robocop est parfaitement crédible tout en laissant l'acteur libre de ses mouvements.
Quant à la machinede guerre ED 209, on la doit au responsable des effets spéciaux Phil Tippett.
Dans le monde de l'animation, Phil Tippett est une légende. S'inspirant du travail de Ray Harryhausen (« le 7ème voyage de Sinbad », « le choc des titans ») et de Willis O' Brien (King Kong), nommé la rétroprojection, il a effectué une transition incroyable entre les techniques traditionnelles image par image et les images de synthèse.
Il a notamment contribué à « Jurassik Park », « Starship Troopers » ou encore « l'Empire contre attaque » (les AT AT c'était lui..).
Bref le talent de l'animateur est évident dans le film; mention spéciale à la scène où le ED 209 tombe dans l'escalier et trépigne comme un bébé colérique!
Porté par une musique puissante, le film prend parfois l'allure d'une épopée fantasy et Robocop devient une espèce de guerrier assoiffé de vengeance. Rien de plus normal quand on sait qu'avant de devenir le compositeur attitré de Verhoeven, Basil Poledouris avait oeuvré sur la magnifique musique de « Conan le barbare ».
Plus concrètement, le film est partagé entre une violence exacerbée et une virulente critique de la société américaine.
Ultraviolence à la fois ludique; où les méchants meurent au ralenti, criblés de balles, où les explosions et cascades en tous genres sont légion. Difficile de ne pas esquisser un sourire quand un braqueur de superette prend un vol plané avant de s'encastrer dans une vitre de surgelés, difficile aussi de ne pas apprécier la virtuosité de la fusillade dans l'entrepôt de drogue où Robocop dégomme ses ennemis en avançant inexorablement avant de faire traverser un méchant à travers 3 vitres à la suite sans palabrer.
Mais aussi ultraviolence choquante. Là, Je pense à 2 scènes marquantes. La première est évidemment la mort de Murphy. D'un coup de fusil à bout portant, il se fait arracher une main avant d'être criblé de balles et d'en prendre une dans la cafetière. Cette mort horrible à même fait s'abattre la censure sur le film. Cette scène est due au souhait du réalisateur qui en guise de préambule à la résurrection de son personnage sous forme de cyborg, voulait montrer l'une des scènes les plus violentes de l'histoire du Cinéma; sorte d'analogie avec la crucifixion.
La seconde est celle de la mort d' Emil. Complètement liquéfié par un produit chimique, il se fait écraser par une voiture. L' immonde maquillage et la violence de l'impact accompagnés par un montage serré et des bruitages suggetifs (on n'a aucun mal à imaginer la chair coller au pare brise...) en font une séquence totalement répugnante.
Accroc de la provoc, les films de Verhoeven sont des modèles de subversion. « Robocop » est parcouru d'infos télévisés et de messages publicitaires où les erreurs de contrôle d'un rayon satellite entraînent un incendie gigantesque et où les familles jouent à la guerre nucléaire sur jeu de plateau.
Les personnages ne sont pas épargnés non plus. Les hauts dirigeants sont tous corrompus et une erreur qui se traduit par la mort d'un membre du conseil est vite étouffée. Personne n'est irremplaçable...Le héros est un jeune blanc bec arrogant qui confond la réalité et la télévision ( faire tournoyer son révolver ne le rendra pas invincible)
Si Robocop ne se souvient pas de son nom, c'est parce qu'il n'est qu'un simple produit industriel or le film se passe à Détroit, capitale de l'industrie automobile américaine...
Cette perte puis recherche d'identité est l'un des thèmes principaux du film.
Parcourant sa maison vide mais riche en souvenirs, il n'aboutira au but de sa quête qu' à la fin du film où il lance sa réplique « je suis Murphy » riche de sens. Ou quand l'homme prend le dessus sur la machine.
Bien qu'un peu daté dans le domaine des effets spéciaux, Robocop est un chef d'oeuvre des années 80. Film d'action noir et violent mais également empreint d'émotion, porté par des acteurs convaincants, une BO superbe et une réalisation épatante, c'est aussi un brûlot anti conservateur et anti capitaliste. Un film culte et incontournable.
Note ****

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