vendredi 12 décembre 2008

Used Cars



Deux freres vendeurs de voitures d'occasion se detestent.
Pourtant quand l'un d'eux disparait l'autre se met a enqueter.

Un film peu connu (je ne sais même pas s'il est sorti en France) mais à voir absolument!

Avant de connaître la célébrité avec Roger Rabbit et la trilogie des Retour vers le futur, Robert Zemeckis avait déjà réalisé quelques films peu connus.

Used Cars présente la bataille loufoque de vendeurs de voitures d'occasion concurrents.
L'un est propriétaire d'une casse miteuse et son frère est patron d'une grande société.
Afin d'hériter de la casse de son frère, le grand manitou de la finance va l'éliminer (carrément!).
Mais c'est sans compter sur les employés qui vont cacher le corps et reprendre l'affaire sans attirer l'attention.

Pour attirer le pigeon, tous les moyens sont bons.
Striptiseuses aguicheuses, billet accroché à une canne à pêche ou publicités caricaturales où l'on abat les prix (au sens propre) diffusées durant un discours présidentiel, ces escrocs de bas étage ne reculent devant rien pour se faire de la pub.

Visuellement c'est du très bon boulot.
La photographie est belle, les couleurs chatoyantes flattent la rétine et les cadrages sont très bien choisis.
Rien à redire sur le montage : Michael Khan est le monteur attitré de Spielberg depuis un bout de temps et connaît son travail.

Le film est un petit budget mais Zemeckis peut compter sur ses amis Spielberg et Milius pour fournir le nécessaire à sa vision déjantée du monde automobile.

Le casting est mené par le toujours impeccable Kurt Russel.
Tout en tchatche et sourire bright, il n'a pas son pareil pour se mettre les clients dans la poche.
Aidé de ses acolytes (un noir bagarreur et un flambeur superstitieux), il va tout mettre en oeuvre pour conserver son pauvre terrain vague.

Le scénario est écrit par Bob Gale et Zemeckis lui même, le duo responsable de Retour vers le futur.
D'apparence simpliste, il regorge de rebondissements et d'humour.
Comique de situation, gags visuels, cascades burlesques, humour noir ou coquin, les scénaristes s'amusent à inventer des situations impossibles à résoudre pour leurs personnages et à imaginer comment ils vont s'en dépêtrer.

Le final est hallucinant.
Je n'avais pas vu un tel rassemblement de voitures dans le même plan depuis les Blues Brothers!

Commercialement, le film n'a pas été un succès.
Probablement à cause de dialogues remplis de « fuck », qui aux USA interdisent automatiquement une sortie tout public, et à un humour souvent assez osé.

C'est bien connu, les plus grands génies sont souvent incompris.
Le film a donc été pris pour ce qu'il n'est pas, à savoir une comédie familliale classique.
Mix entre cartoon live, comédie noire et grand spectacle, Used Cars est bien plus que ça!

Note : ***

Dodgeball



Une petite salle de gym est menacée de fermeture. Pour éviter ce sort, les gérants vont devoir affronter ceux d'un grand centre de fitness dans un tournoi de balle au prisonnier.

Ne cherchez pas une once de réalisme dans ce film!
L'histoire est complètement invraisemblable et à vrai dire on n'y croit pas une seconde.
Totalement dépourvu de complexité, le film est juste là pour nous faire passer un bon moment.

Les acteurs sont plutôt bons. Vince Vaughn est charismatique en leader pantouflard et Ben Stiller fait un véritable rôle de composition dans la peau de ce type odieux, bouffi d'égocentrisme et dont la cervelle aurait fondu dans les muscles.
Dans les rôles secondaires, Justin Long (Die Hard 4, Admis à tout prix) montre une fois de plus qu'il sait jouer la comédie et Alan Tudyk est tout simplement parfait en pirate.

La réalisation manque parfois de panache mais les situations farfelues et les dialogues vulgaires au possible font que l'on rit souvent.
Certaines répliques sentent bon le culte ( « You can dodge the wrench, you can dodge the ball! ».

Conscient de l'aspect autocaricatural du scénario, le réalisateur n'hésite pas à pousser le bouchon jusqu' à faire intervenir de vrais célébrités à des moments clés , dont Lance Armstrong et surtout l'innénarable Chuck Norris !!

Je regrette que les matchs n'aient pas reçu plus d'attention.

Passé les séances d'entraînement loufoques à souhait, le film tourne un peu à vide.
Malgré le plaisir de voir s'affronter des équipes accoutrées le plus ridiculement possible (les SM, les bucherons, les girl scout...) la majorité des matchs sont expédiés en quelques secondes montre en main, si bien qu'on a l'impression qu'ils sont justes pour rallonger artificiellement la durée du film..
Un peu plus d'imagination aurait été la bienvenue même si la fin se rattrappe avec un clin d'oeil appuyé à Star Wars...


Heureusement c'est moins sur les matchs que sur les relations entre les membres de l'équipe que repose le coeur du film.
Leur amitié transpire à l'écran et chacun a ses petites manies.
On s'attache facilement à cette bande de loosers parce qu'au fond, ils nous ressemblent.


Au final, on se retrouve avec une comédie américaine basique que les fans de Ben Stiller (Starsky et Hutch, Une nuit au musée ; moi j'accroche pas mais je sais que certains se fendent la poire...) iront probablement jusqu'à vénérer mais qui se détache du lot par ses séquences absurdes, ses héros attachants et ses dialogues surréalistes.

Note : **

Aniki mon frère



Fuyant Tokyo, Yamamoto va à Los Angeles. Il retrouve son demi frère et prend la tête d'un gang. En imposant le code d'honneur des Yakuzas, il supprime les bandes rivales et étend son territoire.
Mais en refusant de traiter avec la mafia, il déclenche un affrontement meurtrier...

Le 9ème film de Takeshi Kitano.
Oui c'est important de le dire parce que comme Tarantino, Kitano n'est pas un réalisateur prolifique mais chacun de ses films est un événement.

Après Hana-Bi, je découvre donc un nouveau film de Kitano. Fait intéressant, c'est son premier film sur le territoire américain. Mais ce n'est pas pour autant que le film n'est qu'en anglais.
Le personnage joué par Kitano arrive du Japon et ne parle pas un mot d'anglais (c'est Lost in Translation à l'envers). Sa langue de prédilection reste donc le japonais.
C'est donc une bonne nouvelle pour les amateurs des deux langues et surtout ça renforce le réalisme.

Tout comme les langues, le film combine deux mondes différents.
Il associe des jeunes dealers de la rue, livrés à eux mêmes, aux anciennes traditions et à la discipline des Yakusas. Entre l'univers des petites frappes sans avenir qui vendent de la drogue pour survivre et celui où le fait de se suicider pour sauver son honneur n'est qu'une formalité, on assiste à un véritable choc des cultures.

Kitano c'est un acteur mais c'est surtout une présence. Son visage, marqué par un accident, est très expressif. Son personnage est d'un sérieux imperturbable mais qui peut se déchaîner à tout instant.
Peu loquace, c'est le genre de type qu'on ne regarde pas droit dans les yeux à moins d'avoir fait son testament.

A ses côtés, on trouve Omar Epps. Inconnu au bataillon mais plutôt bon acteur.
Sa première apparition le présente comme une racaille qui cherche les ennuis mais on se rend compte par la suite que c'est en réalité un brave type qui n'a juste pas bénéficié de l'éducation qu'il méritait.
Entre son personnage et celui de Kitano, c'est à la vie à la mort.
Bien qu'il se ramasse un tesson de bouteille dans l'oeil en guise de présentation (!), il est attiré par cet homme mystérieux qui ne connait pas la peur.
Leur amitié va se renforcer tout au long du film à tel point qu'ils deviendront frères spirituels.

Yamamoto est condamné à mort dans son pays mais il préfère aller finir ses jours ailleurs.

Un homme qui connait son destin ne connait pas la peur.
N' ayant plus rien à perdre, il va se jeter dans un carnage impitoyable pour se prouver qu'il vaut encore quelque chose.
Au fur et à mesure que les cadavres s'amoncellent, la notoriété de son gang s'accroît mais comme toujours, le pouvoir amène l'arrogance et les jeunes vendeurs de drogues jouent les Parrains.
Du haut de leur empire, ils se croient intouchables. Les vrais parrains du coin ne vont pas apprécier et ce sera la chute sanglante jusqu'au final, inattendu mais tellement évident.

Le film présente une guerre ouverte entre Yakusas, gangs black et Chicanos, autant dire que de l'action il y en a. Un réalisateur américain basique aurait sûrement choisi de glorifier les scènes d'action mais pas Kitano.



Ecoeuré par la violence exaggérée des films d'action modernes (vitres qui dégringolent sous les coups de feu, fusillades au ralenti, héros qui ne se font pas toucher, explosions gigantesques...), il s'éloigne des standards hollywoodiens en proposant une violence réaliste qui impressionne autant qu'elle choque. « Je veux que les scènes violentes fassent vraiment mal » dit-il. Voeu exaucé!

Pas de demi mesure ici, les tirs dans la tête entraînent une énorme giclée de sang sur les murs et certaines scènes de torture laissent un goût amer dans la bouche (les baguettes dans le nez, aïe!).
Sans parler des Hara Kiri et autres amputations du petit doigt, pratique visiblement très appréciée chez les Yakusas...


Les coups de feu sont imprévisibles et chaque balle tirée laisse un impact sur les corps.
Il faut voir Kitano se débarasser de 3 tueurs dans une voiture pour saisir la qualité de sa mise en scène. Entouré par deux mafieux et tenu en joue, il dévie brusquement l'arme vers le conducteur dont la cervelle vient s'étaler sur le pare brise. Il abat ensuite un des autres avec le pistolet qu'il cachait dans sa veste. La voiture continue en ligne droite jusqu' à percuter violemment une barrière. Le troisième tueur sort du véhicule en courant et essaie d'escalader un grillage avant que Kitano ne l'abatte sans prendre la peine de bouger de son siège. Le tueur est étalé, une main encore accrochée au grillage.

Séquence brutale parmi tant d'autres où l'absence de musique accentue un réalisme choquant...

La musique est d'ailleurs composée comme d'habitude par le talenteux Joe Hisaishi (tous les Hayao Miyazaki et de nombreux Kitano)et restitue bien l'ambiance film de gangsters en combinant influences jazzy et mélodies plus douces.


Doté d'un scénario noir et pessimiste, le film bénéficie d'une mise en scène radicale et efficace. Salué par la critique et servi par un duo d'acteur excellent, ce choc des cultures va laisser une trace .
Homme orchestre, Kitano assure devant et derrière la caméra et même au niveau du montage.
Il prouve une fois de plus qu'il est un des cinéastes les plus importants de sa génération.

Note : ***

Princesse Mononoké




Blessé par un sanglier géant transformé en démon, le jeune guerrier Ashitaka doit quitter les siens et partir à la recherche du dieu-cerf qui, seul, pourra défaire le sortilège. Au cours de son voyage, Ashitaka rencontre Lady Eboshi, une sacrée femme à la tête d'une communauté de forgerons, qui doit se défendre contre les animaux de la forêt et une fille sauvage appelée la «Princesse Mononoké »...


Dans le milieu de l'animation japonaise, Hayao Miyazaki est une référence.
Avec son confrère Isao Takahata, il est le fondateur du célèbre studio Ghibli.

Miyasaki est souvent considéré comme le Walt Disney japonais. Honnêtement, cela peut signifier n'importe quoi mais c'est surtout une manière de dire que ses dessins animés atteignent un niveau de qualité rarement atteint.


Si au Japon Miyazaki était connu depuis longtemps, Princesse Mononoké est une de ses premières oeuvres qui a atteri chez nous.
Je me souviens encore de la première fois que j'ai vu le film. C'était dans un cinéma d'art et d'essai. Jamais un animé japonais ne m'avait marqué aussi profondément; il était vraiment différent de tout ce que j'avais pu voir auparavant.

A l'époque, la plupart des critiques ont dénigré le film pour sa violence extravagante. Le film a alimenté l'idée selon laquelle le cinéma d'animation japonais se complaisait dans la violence gratuite, ce qui pouvait nuire à nos chères petites têtes blondes.

Il est vrai que le film est violent, c'est d'ailleurs le plus violent de tous les Miyazaki mais si les critiques n'ont pas vu le message du film alors c'est qu'ils ont manqué le plus important.

Princesse Mononoké raconte le combat incessant que mène les animaux et les dieux pour protéger leur forêt des hommes et de leur folie destructrice. Chaque nuit les animaux replantent les arbres déracinés par les hommes pour alimenter le feu de la forge mais en ont plus qu'assez et veulent en finir. Les habitants de la forge doivent donc lutter contre ces créatures mais aussi se battre contre une armée venus prendre contrôle de la forge.

Princesse Mononoké est indubitablement le film le plus sombre de Miyazaki.
Oui les bras sont arrachés, oui les têtes volent dans les airs, oui le sang coule à flot mais la violence n'est jamais gratuite, elle apporte un réel plus à l'histoire. Avec un univers aussi cruel et réaliste, faire un film tout public n'aurait fait que dénaturer l'oeuvre.

En fervant écologiste, ses films sont tous empreints d'une sagesse et d'un respect de la nature comme on en voit peu.
Depuis son premier long métrage, Nausicaa de la vallée du vent, la relation qu'entretient l'homme avec son environnement joue une place primordiale.

Traumatisé par les attaques de Nagasaki et d'Hiroshima, Miyasaki n'hésite pas à placer des références aux horreurs qui en découlent.
De même que l'arbre géant de « Mon voisin Totoro » rappelle une explosion nucléaire, les sylvains, petits êtres difformes, sont réminiscents des enfants nés après la guerre, sujets aux radiations.
Il représente le dieu de la mort comme une gigantesque marée noire qui s'abat sur la terre.



Contrairement à la plupart des productions de l'époque que l'on pouvait « admirer » en suivant le Club Dorothée, personne n'est tout noir ou tout blanc. Il est impossible de distinguer gentils et méchants dans le film. Se voulant réaliste Miyazaki évite tout manichéisme primaire et met en scène des personnages eminament complexes, humains quoi.

Les hommes déracinent les arbres et détruisent la montagne pour pouvoir faire fonctionner les forges. Forges dont ils se servent pour faire fondre l'acier et ainsi fabriquer des arquebuses.
Quand à la haine qui transforme les dieux animaux en démons, ce sont eux qui en sont responsables.
Mais ces mêmes humains fabriquent ces armes pour pouvoir survivre.
Lady Eboshi, «la méchante du film » veut tuer le Dieu cerf seulement pour répondre à la volonté de l'Empereur. De plus, elle enrôle des femmes de petite vertu que tout le monde maltraite et prend soin de lépreux. Elle n'est donc pas mauvaise.

Ashitaka lui même, bien que héros de l'histoire, se laisse parfois envahir par la haine et tue de sang froid plusieurs samouraïs.

Chacun révèle a un moment ou un autre le côté sombre de sa personnalité et même les personnages les plus antipathiques ont de bonnes raisons de se battre.


De même, les femmes chez Miyazaki ne sont pas les demoiselles en détresse prises aux griffes des méchants ou les femmes fatales responsables de la chute du héros. Les femmes de la forge sont fortes et ont du caractère à revendre. Elle se révèlent aussi courageuses au combat que les hommes et refusent de se laisser marcher sur les pieds.
Pour autant, Miyazaki n'en fait pas des mâles avec un soutien gorge.
Elles gardent leur fémininité lorsqu'elles papotent entre elles et elles font même des avances à Ashitaka.

Et si Mononoké est une guerrière, elle n'en est pas pour autant femme. Il est impossible d'oublier son apparition bestiale lorsque, la bouche couverte de sang, elle suce la plaie d'un loup pour en extirper le poison mais sa douceur ressort instinctivement lorsqu'elle doit soigner Ashitaka.

La relation qui la lie avec lui est elle aussi moins évidente qu' à l'accoutumée.
Leur premier baiser est réellement touchant car ce n'en est pas vraiment un...

Aussi complexe que les personnages est la réalisation. Miyazaki est un esthète.
Chaque pierre, chaque arbuste a été dessiné puis peint avec un soin du détail impressionnant. La nature est sublimée à chaque plan par un choix méticuleux des couleurs et de la mise en scène.
Il suffit de voir un début de pluie à l'écran pour s'en rendre compte. Un plan fixe sur sur quelques roches montre progressivement des gouttes de pluie arroser le sol jusqu'à ce qu'une averse assombrisse brutalement le décor. Une vraie pluie n'aurait pas été plus crédible à l'écran.

La mise en scène elle même est une vraie surprise. Si la plupart du temps les plans restent fixes, l'animation prend parfois des aspects stuféfiants d'originalité. Le combat entre Mononoké et Dame Eboshi est filmé comme si l'on était l'un des deux combattants. Chacun frappe vers le spectateur à tour de rôle avec une authenticité dans les mouvements qui atteint des sommets.

Sans trop en dévoiler, la fin est un moment d'anthologie. Alors que la majorité des réalisateurs aurait fait intervenir un Deus Ex Machina pour sauver la situation, Miyazaki choisit de ne pas tomber dans la facilité et va jusqu'au bout de ses convictions en présentant une scène totalement cauchemardesque à laquelle personne ne s'attend...

Il faut aussi souligner l'efficacité des effets sonores.
Pour un film d'animation, ils sont aussi convaincants qu'intelligemment utilisés. Lors des combats les lames de métal se croisent avec rage mais c'est lorsqu'une flèche est décochée qu'on ressent tout le travail effectué à ce niveau. Et quand le dieu de la forêt apparaît à l'écran, le son disparaît totalement, lui donnant une allure mystique saisissante.

La musique de Joe Hisaishi, responsable des BO de tous les Miyazaki depuis ses débuts, est une fois de plus grandiose. Soulignant l'action à merveille elle sait se faire effrayante quand une scène l'exige. Elle est parfois tellement belle qu'elle en donne des frissons!

Magnifique histoire d'amour et de haine dans un Japon féodal habité par des démons et autres créatures du folklore japonais, Princesse Mononoké est aussi une fable écologique superbe.
Un film inmanquable pour tous les fans d'animation japonaise.

Note : ****

Rain Man




Charlie Babbitt voit lui échapper un héritage de 3 millions de dollars au bénéfice d'un frère qu'il n'a jamais connu, pensionnaire d'un institut psychiatrique.
Il décide de l'enlever pour l'échanger contre la moitié de l'héritage...

Rain Man c'est avant tout Dustin Hoffman et son interprétation exceptionnelle d'un autiste surdoué. Son personnage est inspiré du savant Kim Peek, autiste de naissance, capable entre autres de mémoriser des livres entiers.
En incarnant le personnage de Raymond, Hoffman s'inscrit dans la grande tradition des rôles dits « de performance » : ses postures, ses regards, ses moindres expressions et mouvements sont le fruit d'un travail si précis que tout effort de composition semble disparaître. L'acteur, qui reçoit un oscar pour le rôle, est tellement convaincant qu' à la sortie du film de nombreux spectateurs ont vraiment cru qu'il était autiste.

Pas étonnant que le premier plan du film montre une voiture puisque Rain Man est un road movie.
Le road movie c'est ce voyage forcé que font des personnages que tout oppose mais qui vont au final se rapprocher les uns des autres.

Aux côtés de Hoffman on retrouve un Tom Cruise plutôt charismatique et crédible dans le costume flambant neuf du jeune cadre fonceur et trop sûr de lui.

Au début du film le personnage de Tom Cruise est l'égocentrique parfait.
Il ne pense qu'à lui et à la fortune qu'il peut amasser.
Les sentiments, il ne connait pas.
C'est un solitaire, il ne sait pas communiquer et sa copine (Valéria Golino, minoix mutin et charmant petit accent italien) a de plus en plus de mal à supporter son mutisme et son caractère infect.
Lorsqu'il apprend la mort de son père, c'est à peine s'il fronce un sourcil. Faut dire que son père et lui n'ont jamais été très proches.
En apprenant plus sur le passé de Charlie on comprend pourquoi il est devenu si distant avec les autres.

Ses premiers moments passés avec Raymond sont pires les uns que les autres.
Il croit que Raymond fait exprès d' être comme il est et qu'un tour chez le psy pourra le guérir. Ses manières l'insupportent et il n'est pas loin de craquer lorsqu'il doit traverser les Etats Unis en voiture pour pouvoir rentrer chez lui.
Pour cet homme fier et entreprenant, il est impossible de comprendre que le cerveau de Raymond est différent. Que son problème ne se règle pas en « passant quelques coups de téléphone ».

Mais si Raymond a un problème qui ne peut pas être résolu, lui en a qui peuvent l'être.

La peur de Raymond de prendre l'avion ou de rouler sur l'autoroute va obliger son frère à emprunter les petites routes, le voyage n'en sera que plus long, et se verra forcément initiatique.

Charlie passe son temps à demander aux autres s'ils l'écoutent mais c'est lui qui reste sourd à leurs conseils. Il se moque éperdumment de ce que pense sa petite amie et envoie balader medecins et autres psychologues. Pourtant pour s'adresser à Raymond il va apprendre à faire preuve de plus de patience et d'écoute ce qui lui permettra d'évoluer sur le plan psychologique.

D'après ce petit bout de scénario, le film semble très austère. On s'attend à un drame psychologique qui va nous faire vider la boîte de Kleenex mais il n'en est rien.


Très classique au cours de la première heure, le film prend ensuite des chemins innatendus.
Le Rain Man du titre fait son apparition et bouleverse complètement les relations entre les deux frères. De plus, Raymond a une faculté hors du commun pour compter et mémoriser n'importe quoi.
Ce don pourrait bien être utile à Charlie...

Du côté de la réalisation Barry Levinson soigne autant les cadrages que la lumière.
Le montage saisit parfaitement les émotions de Raymond et les liens qui unissent les deux frères.

Le film baigne dans une ambiance très colorée qui épouse élégamment le rythme de la musique.
Hans Zimmer livre une fois encore une bande son exemplaire où les chants africains se mèlent aux instruments les plus exotiques (la musique rappelle Beyond Rangoon).

Difficile de traiter le film comme une comédie car on ne rit pas souvent mais on ne pleure pas non plus. Le film joue sur la corde raide en évitant de tomber dans la caricature d'un côté et dans la facilité du pathos de l'autre.
Les émotions ressenties sont fortes mais sincères.

Même si Rain Man a des longueurs, l'intelligence du scénario et l'interprétation sans faille des acteurs le tire vers le haut. 4 oscars mérités.
Un beau film.

Note : ***

Les Tontons Flingueurs


Eh ben voilà 100 critiques ! Pour l'instant je tiens le rythme.
J'avais envie de marquer le coup avec un film qui me tient à coeur...

Alors qu'il est sur le point de casser sa pipe, un ancien truand, propriétaire de nombreux établissements, lègue tout ce qu'il possède à un vieux copain retiré des affaires. Mais en échange il lui confie la garde de sa fille...

Georges Lautner c'est le réalisateur de « Ne nous fachons pas », « Les Barbouzes », « Le cave se rebiffe ». Michel Audiard c'est des dialogues inoubliables tels que : « un intelligent assis va moins loin qu'un con qui marche », « Quand on mettra les cons sur orbite, t'as pas fini de tourner ».

Dans les Tontons Flingueurs c'est « Les cons ça ose tout c'est même à ça qu'on les reconnait ».

Et dans Les Tontons Flingueurs des cons y en a et c'est pour ça qu'on les aime!
Ces cons c'est une brochette d'acteurs formidables, comme on en voit rarement : Lino Ventura, Bernard Blier, Jean Lefebvre, Claude Rich, Francis Blanche, Robert Dalban...

Bref Les Tontons Flingueurs c'est la crème de la comédie française des années 60.

Le succès du film vient du décalage entre la mise en scène et les situations.
Georges Lautner filme comme s'il s'agissait d'un polar tout ce qu'il y a de sérieux.
Les cadrages et les plans où l'image est aussi nette au premier plan qu'au fond de l'écran rapellent le cinéma d'Orson Welles. L'ambiance film noir est accentuée par une photographie noir et blanc impeccable qui joue sur les fondus enchaînés et une utilisation intelligente des ombres et des lumières.

A première vue, rien ne distingue le film d'un vrai film policier. Et c'est justement grâce à ce sens du détail que le pastiche fonctionne.

Car en y regardant de plus près la musique loufoque est presque caricaturale (les mêmes notes reviennent sans arrêt), les cascades sont suggérées par des effets de montage, les décors en carton pâte s'effondrent lors des bagarres et je ne parle pas des bruitages des coups de feu rendus célèbres par une utilisation d'effets sonores aussi insolites que ridicules.

Les héros du film ce sont autant les acteurs que les dialogues.
La sacrée bande de vedettes réunies pour le film joue avec un sérieux inébranlable mais s'amuse assurément. Leur amitié et cette terrible envie de déconner ensemble transparait à l'écran.

Personne ne vole la couverture, chacun est extraordinaire avec son style propre.
Les stars de l'époque (Ventura, Blier) ne font même pas d'ombre aux petits nouveaux dont Sabine Sinjen, mignonne et malicieuse, et Claude Rich.
Rich parvient même à tenir tête à la présence imposante de Ventura ; sa démarche théâtrale et ses dialogues pompeux en font un personnage mémorable.

Au départ le scénario est tiré du roman d'Albert Simonin « Grisbi or not grisbi ».
L'histoire est assez noire et violente : les personnages principaux sont des tueurs professionnels ou des truands sans scrupules et certains meurent de façon plutôt choquante (brulés vifs ou abattus de sang froid).
Mais en fait, le scénario on s'en fiche. Contrairement aux vrais films policiers, on ne cherche pas à découvrir les responsables des meurtres. Tout ce qui nous interesse c'est de prendre du plaisir avec les acteurs.



Dans le cinéma français, Audiard est sans conteste le dialoguiste le plus (re)connu.
Il avait la faculté exceptionnelle de conférer une originalité surprenante à la moindre ligne de dialogue. Sous sa plume, la phrase la plus banale devenait une mine d'or pour les amateurs de mots d'esprits et d'expressions élaborées.
Il savait manier la langue française avec une maîtrise rare et ses répliques ciselées sont toutes devenues des classiques. Le film en regorge et chacun aura sa préférence.
Ma réplique favorite dans le film : « C'est curieux chez les marins ce besoin de faire des phrases ».
J'éclate de rire à chaque fois!!!

Les acteurs s'en donnent à coeur joie avec les dialogues. Le décalage entre leur jeu sérieux et ce qui est réellement dit est un bonheur. Les faceties verbales s'adaptent parfaitement aux situations les plus incongrues et aux gags visuels. On frole carrément le burlesque lorsque le père d'Antoine débarque en plein milieu d'une fusillade sans s'en rendre compte.

La finesse et l'humour caustique des dialogues a engendré de véritables moments d'anthologie, le plus connu étant probablement la séquence de la cuisine. La complicité des acteurs semble évidente et chacun donne le meilleur de lui même. A ce moment là, ces monstres antipathiques (mais charismatiques en diable!) ne sont plus des caricatures de personnages mais deviennent des êtres humains avec un passé et des souvenirs.


Au temps de sa sortie, le film n'a pas été un grand succès et certains critiques l'ont même descendu. Presque 50 ans plus tard, les répliques sont devenues légendaires et certains sont capables de réciter par coeur des pans entiers de dialogues.
Au fil des ans Les Tontons Flingueurs a fait partie de notre patrimoine et s'est assuré une place d'intouchable au Panthéon du cinéma français.

Si je devais choisir 10 films à amener sur une île déserte, il en ferait incontestablement partie.


Note : ****

Audition




Veuf, Aoyama rêve secrètement de se remarier. Son ami, producteur de télévision, a une idée ingénieuse : organiser un casting pour une série télé afin de trouver la perle rare. C'est ainsi qu'il fait la connaissance d'Asami, une jeune femme timide à la beauté troublante...

Encensé par la critique, Audition s'est forgé une réputation d'oeuvre choc.
« Un sommet d'effroi déjà culte »
« Un véritable choc comme le fut Massacre à la tronçonneuse en son temps »

Avec ce genre de critique, pas besoin de me dire deux fois de voir le film!

Audition est clairement divisé en deux parties.

La première nous présente le personnage principal (joué par Ryo Ishibashi, sidérant de naturel). On le découvre au chevet de sa femme avant qu'elle ne meure puis on l'observe dans sa vie quotidienne. Aux journées passées au bureau et ses discussions avec son ami se succèdent les relations qu'il entretient avec son fils qu'il élève seul.

Vient ensuite la scène de l'audition où il rencontre Asami. Pour lui c'est certain c'est la femme de ses rêves. De coups de téléphones en dîners au restaurant, ils vont peu à peu se rapprocher...

Cette première partie, Takashi Miike la filme comme un mélodrame.
La musique se fait très présente, les situations font presque clichés (Asami est la douceur incarnée et cherche à le revoir à tout prix), on a vraiment l'impression de regarder le feuilleton du dimanche soir.
A ceci près que Miike impose un style élégant et travaillé à l'opposé des prodcutions télé. La photographie du film est impeccable, chaque plan est superbe. Il multiplie les plans fixes interminables et soigne le montage de façon à maintenir l'attention.

On sait tous que le film va basculer dans l'horreur à un moment donné, d'instinct on se prépare au retournement de situation tant attendu, mais il ne vient pas...
La première partie est en effet plus importante que dans les films du genre car elle ne se contente pas de présenter les personnages, elle leur permet d'évoluer et de tisser leurs relations.
Sur les 2 heures du film, plus de la moitié sera consacrée à l'histoire d'amour qui se crée.

Et là on se dit que si le film nous a épargné durant tout ce temps, on va vraiment en prendre plein la tête durant la dernière demi heure!

Oui et non...

Au Japon, le succès du Ring de Hideo Nakata a engendré de nombreuses productions de films dont l'horreur est basée sur les effets de surprise et les phénomènes surnaturels.

Miike renverse la tendance en mettant en scène des situations beaucoup plus réalistes.
Dans Audition, la peur ressentie par le spectateur est davantage liée à la douleur : la scène culte du film est en effet une scène de torture. Pour le personnage d'Asami (Eihi Shina, visage d'ange, sourire de psychopathe!), souffrance et amour sont naturellement liés.
Si on aime quelqu'un, on lui appartient corps et âme...surtout corps!

Mettre le spectateur mal à l'aise, c'est le but recherché par le réalisateur. Et de ce côté, je dirais que le film est dangereux pour un public non averti. En montrant le côté effrayant de l'âme humaine, Miike va loin dans la violence extrême et le sadisme.
Le film peut réellement se montrer traumatisant pour des spectateurs sensibles.

ATTENTION SPOILER



Pour ma part, je n'ai pas été plus choqué que ça pour deux raisons.

D'abord, visuellement la scène est très efficace mais même sans regarder attentivement on voit que le plus choquant est suggéré par le montage et les bruitages (extrêmements réalistes, par ailleurs).
Et puis le coup du pied jeté contre la vitre au premier plan, si c'est pas de l'humour noir chargé de dédramatiser, je ne vois pas ce que c'est...

La peur et la tension nous font imaginer des choses que l'on ne voit pas à l'écran.
Je ne voulais pas d'un autre Hostel ou d'un énième Saw mais je trouve que le sujet permettait d'aller beaucoup plus loin...
Ne croyez pas que je suis un adepte du gore à tout va, la preuve j'ai trouvé que là scène où Aoyama décide d'appeller chez Asami est la plus terrifiante du film (et elle ne bénéficie d'aucun effet spécial).

D'un autre côté le film a été réalisé avant les autres Saw et compagnie donc je comprends que pour l'époque il a fait sensation. Il s'agit peut être même d'un précurseur dans son genre.

Tout ça pour dire que la scène est donc loin d'atteindre l'extrême limite de la cruauté.
En revanche, après recherches, il semble que Miike n'est pas cherché à aller jusqu'au bout en matière de violence. Il s'est en effet fixé des limites pour respecter le livre (le film est tiré d'un roman de Murakami).

Mais surtout la scène est entrecoupée de séquences oniriques. Drogué, Aoyama se met à délirer et le film nous met alors face à des images de terreur sans nom.
Oui on est dégoûté par ce que l'on voit, oui on a envie de détourner le regard et de rallumer la lumière mais Miike a peut être oublié une chose : ce n'est qu'un rêve...

Dans un rêve, on peut mettre n'importe quelle créature immonde ou faire subir les pires sévices à quelqu'un, ce n'est pas la réalité. On sait très bien que pendant ce défilé d'images à glacer le sang, le héros est juste endormi. L'impact de la scène en est donc réduit puisqu'il n'y a pas de danger.

Une fois réveillé la scène de torture commence et au moment le plus angoissant, paf re rêve!
Le couple se retrouve dans un lit (rapport à une scène précédente). Ouf, c'était la scène de torture le vrai rêve. Tout est bien qui finit bien!
Arrête Miike, c'est évident que le film ne va pas se terminer comme ça, pourquoi tu nous fais le coup de la fausse happy end?
Non seulement c'est pas crédible mais ça relâche la tension et ça fait perdre du temps.

Bref cette fameuse scène qui aura fait couler tant d'encre ne dure en fait pas plus d'un quart d'heure (en comptant les coupures rêves) au total. C'est peu.

Quant au dénouement, on a malheureusement droit au Deus Ex Machina classique où un personnage secondaire surgit au moment opportun et se débarasse rapidement du méchant.


Dans une interview Miike disait « Au départ, je voulais tourner cette scène sans bruitages et sans musique, juste laisser les images défiler et puis je voulais finir le film sans générique, comme si on avait coupé la pellicule. Je voulais faire un film que les spectateurs regrettent d'avoir vu. »

Ah ben, il n'y a va pas avec le dos de la carrière le Miike, s'il voulait carrément que l'on déteste son film, il avait des idées en réserve...



FIN DU SPOILER




Audition est ce qu'on appelle un ovni cinématographique.
Inclassable et très particulier, le film marque une date dans l'histoire du film d'horreur. C'est une oeuvre majeure mais qui divise. La plupart auront du mal à d'adhérer à l'extrême violence véhiculée par le film.
Moi j'ai beaucoup aimé même si la fin m'a laissé sur ma...faim

Note : **