samedi 28 mars 2009

Arrête ou ma mère va tirer!




Le sergent de police de Los Angeles Joe Bomowski voit sa vie complètement chamboulée quand sa mère Tutti vient lui rendre une de ses rares visites.



Considéré pour beaucoup comme l'un des plus mauvais film jamais réalisé, "Arrête..." ne mérite pas sa réputation.

Le scénario a reçu le razzie award du plus mauvais.
Effectivement il demeure très basique et ne repose que sur une seule idée : les relations entre la mère et le fils.
Sur ce point, on s'aperçoit que Tutti est vraiment envahissante et qu'en plus de traiter son fils comme un gamin de 8 ans, elle ne se gène pas pour interférer dans sa vie sentimentale.

Pathétique, limite insupportable les dix premières minutes, le scénario devient plus intéressant lorsque Tutti se retrouve témoin d'un meurtre, et en prime avec la possession d'une arme à feu illégale ce qui lui permet de faire équipe avec son ronchon de fils.

Si l'on passe l'éponge sur le fait qu'aucun dealer d'armes ne serait assez idiot pour vendre une arme à feu à une vieille dame dans la rue, qu'on fait l'impasse sur des ficelles grosses comme des cordages de bateau (on reconnait quelqu'un à son éternuement!) et qu'on oublie le dénouement annoncé dès le départ par le titre, il ne reste pas grand chose certes. Et pourtant...

Comme le scénario, les deux acteurs principaux ont été récompensés en tant que plus mauvais acteur pour Stallone et plus mauvaise actrice pour Estelle Getty.

Habitué aux films d'action testotéronés, on pourrait croire que Stallone n'a pas sa place dans une comédie. Malgré tout, je le trouve plus crédible dans ce rôle de flic célibataire qui en pince secrètement pour son supérieur qu'en surhomme des montagnes dans le navrant "Cliffhanger".

On ne peut pas dire qu'il en fasse des tonnes à l'écran mais c'est justement son attitude, limite blasé et désespéré, face à la tornade ménagère qui lui sert de mère qui le rend drôle. Ses expressions et mimiques sont parfois tordantes.
Non, il ne mérite pas son razzie award!

De même Estelle Getty, pour qui c'est le premier rôle au cinéma, se révèle aussi charmante que faussement irritante dans la peau de Tutti.
A l'extrême opposé de Stallone, elle, elle en fait des tonnes.
Bardée d'un éternel sourire malicieux, elle se montre aussi prompte à faire l'éloge de son fils à la gente féminine qu'à envoyer ballader les gros malabars.

Physiquement comme intellectuellement, ces deux là ont autant de points communs qu'une armoire à glace et une table de coiffure. Et c'est justement ce qui les rend complémentaires.

A l'écran le duo fonctionne plutôt bien et nous offre de bons moments. Les situations sont inégales mais la plupart réservent leur lot de bonnes idées.

En revanche, l'acteur qui joue le gros biker et la jolie Jobeth Williams exceptés, les autres acteurs font peine à voir et le méchant du film est parfaitement insipide.

La réalisation plombe parfois le film à force d'insister sur des scènes pas drôles pour un sou mais se rattrape aisément lors des (rares) courses poursuites où les effets sonores et le montage font bon ménage. Et si le scénario parle d'armes illégales et de meurtres, l'ambiance est à la légèreté, ce qui sied parfaitement à cette comédie sans prétention.


Une comédie inégale, portée par un duo d'acteurs antagonistes et inattendus, qui mérite une meilleure chance que celle donnée par sa piètre réputation.

Note : **

Les 3 Royaumes




En 208 après J.-C., l'empereur Han règne sur la Chine pourtant divisée en trois royaumes rivaux. L'ambitieux Premier ministre Cao Cao rêve de s'installer sur le trône d'un empire unifié, et se sert de lui pour mener une guerre sans merci contre le Shu, le royaume du sud-ouest dirigé par Liu Bei.
Liu Bei dépêche Zhuge Liang, son conseiller militaire, comme émissaire au royaume de Wu pour tenter de convaincre le roi Sun Quan d'unir ses forces aux siennes. A Wu, Zhuge Liang rencontre le vice-roi Zhou Yu. Très vite, les deux hommes deviennent amis et concluent un pacte d'alliance.
Furieux d'apprendre que les deux royaumes se sont alliés, Cao Cao envoie une force de 800 000 soldats et 2 000 bateaux pour les écraser.
L'armée campe dans la Forêt du Corbeau, de l'autre côté du fleuve Yangtze qui borde la Falaise Rouge (Chi Bi) où sont installés les alliés. Face à l'écrasante supériorité logistique de Cao Cao, le combat semble joué d'avance, mais Zhou Yu et Zhuge Liang ne sont pas décidés à se laisser faire...
Dans un déluge de puissance et de génie tactique, la bataille de la Falaise Rouge va rester comme la plus célèbre de l'Histoire et changer le destin de la Chine pour toujours.




Autant vous le dire tout de suite, difficile pour moi d'être objectif sur ma chronique de ce film tant il me tient à cœur.
Je m'autorise donc à y mettre un peu de ma personne pour éclaircir les raisons de mon engouement et parce que j'en ai envie, d'abord.
Buckle up, we're going back in time :)

Tout commence au lycée où je découvre, par le plus grand des hasards et l'intermédiaire d'un ami, un jeu sur Playstation 2 nommé "Dynasty Warriors 2".
A première vue, il ne s'agissait que d'un vulgaire beat them all asiatique où l'on incarnait des personnages plus ou moins anguleux dans des champs de bataille plus ou moins désertiques. C'était les débuts de la console...

Malgré son principe extrêmement basique et répétitif (taper, taper, taper très fort!), je lui reconnaissais un côté attachant.
Taper d'accord mais quand on parvient à renverser le cours d'une bataille par la seule force de son personnage, ça vous fait tout de suite bomber le torse.
Et quand en plus les personnages débordent littéralement de charisme, c'est un vrai plaisir que de partir au combat!


Bref, un coup de cœur inattendu.

Quelques temps plus tard, je réussis à mettre la main sur l'opus suivant, intelligemment nommé "Dynasty Warriors 3".
Et là c'est l'éclair qui vous traverse la tête, l'épiphanie, la révélation!
Parmi les oeuvres cultes, la plupart des gamers hardcore ne tarissent pas d'éloges sur les "Final Fantasy" et autres "Starcraft" et "Warcraft".
Moi je suis bel et bien tombé amoureux des "Dynasty Warriors".

Pourtant, il fallait vraiment s'accrocher pour entrer dans le jeu ; les généraux chinois doublés par des joueurs de pétanque de la Cannebière ne facilitant pas les choses...

Mais voilà, avec sa multitude de personnages, ses attaques variées, ses combos jouissifs, ses dizaines de niveaux gigantesques et ses nouveaux graphismes hauts en couleurs, le jeu m'avait décidément tapé dans l'oeil.

En plus, il avait un côté jeu de rôle fort sympathique.
Si au départ on commençait comme paysan avec une vulgaire épée en bois, très vite on pouvait monter en grande et gagner de nouvelles armes et compétences.
Aux enchaînements de folies s'ajoutait alors la possibilité de traverser de vastes étendues à bride abattue, de dégommer vicieusement un général ennemi d'une flèche bien placée, d'entraîner ses propres gardes du corps ou encore de s'approprier des tonnes d'objets spéciaux pour booster ses capacités.

C'était vraiment gratifiant d'être félicité pour ses prouesses guerrières et de combattre aux côtés des plus grands.
Sans oublier que selon ses actions et si l'on suivait ou non les ordres, le cours de la bataille pouvait changer du tout au tout et la musique faisait de même, mettant en valeur l'aspect héroïque des combats.

Le jeu offrait de vrais moments d'anthologie (première rencontre avec un éléphant à Nanman, le chateau de Fan recouvert par les eaux ou simplement Lu Bu...) et des champs de bataille dantesques sur lesquels il n'était pas rare de guerroyer férocement pendant plus d'une heure jusqu'à en avoir mal aux pouces.

Mais ce que je trouvais absolument génial, c'était la possibilité de pouvoir faire les campagnes sous l'ordre de chaque armée et non pas une seule imposée.
Ainsi, on découvrait l'histoire de chaque personnage et les alliés d'aujourd'hui devenaient les ennemis de demain.
Un choix passionnant pour une absence totale de manichéisme.


Après le 3, vint le 4 puis le 5 sans oublier les innombrables extensions sorties uniquement dans le but de faire cracher ses derniers centimes aux pauvres fans en manque de sensations. Car il faut bien l'avouer, les jeux se suivaient et se ressemblaient beaucoup. A peine quelques nouveautés faisaient leur apparition ici et là pour tenter, par exemple, de dissimuler la pauvreté abyssale de l'IA ennemie...mais passons.
Comme on dit au pays du Soleil Levant : "Quand on nem, on ne compte pas" (désolé...).

Sans me la jouer tragédie grecque, je dois avouer que ce jeu a bouleversé mon existence. Après avoir passé des journées entières à admirer les superbes mouvements de lance de plusieurs personnages, je me suis même mis au combat au bâton. C'est pour dire.
Cherchez pas, y a des gens comme ça...


Mais pourquoi je raconte tout ça, moi?

Tout simplement parce que les jeux vidéo "Dynasty Warriors" font partie des incalculables adaptations (avec les mangas, les séries télé et autres bandes dessinées) de ce monument de la littérature chinoise qu'est "Les 3 Royaumes".

En effet, "Les 3 Royaumes" est un roman historique chinois dont l'histoire se déroule vers la fin de la dynastie Han et la période qui se situe aux alentours de 220-265.
Ecrit par Luo Guanzhong au 13ème siècle, d'après l'œuvre de Chen Shou, c'est avant tout 7 volumes de 300, 400 pages chacun.

Malgré son ancienneté, le roman reste certainement le plus populaire en Chine et son influence s'étend par delà les frontières (la preuve : je l'ai lu!).
Les 3 Royaumes sont donc...3 et sont : le Wei, le Shu et le Wu ou pour simplifier, dans le jeu comme dans le film, les bleus, les verts et les rouges.

Pourquoi cette passion pour une histoire vieille de plusieurs siècles (en même temps allez dire ça à ceux qui considèrent la Bible comme livre de chevet...)?

Simplement parce que derrière un roman historique d'apparence austère, se cache en réalité une œuvre complexe, d'une grande beauté et d'une richesse inouïe.
Mêlant réalisme et surnaturel (les pouvoirs de Zhuge Liang...), il réussi à créer une véritable mythologie dont les personnages font partie intégrante.
Ainsi, chaque héros, de par son nom, ses actes et son apparence acquiert rapidement une portée universelle.
Très vite, des noms tels que Guan Yu, Cao Cao, Dian Wei, Wei Yan, Lu Bu, Zhang Liao, Liu Bei, Sun Shang Xian...se rattachent à des faits héroïques et des batailles célèbres qui ont changé le cours de l'Histoire de la Chine. C'est pas rien.


Tout ça pour dire que pendant plusieurs années, l'histoire des 3 Royaumes chinois était devenue une vraie passion, solide et sincère, à laquelle j'ai consacré un temps fou.


Il y a quelques mois dans un magazine ciné, je tombe sur un article annonçant officiellement que John Woo était en train de tourner un film sur une bataille mettant en scène les 3 Royaumes précédemment cités.
Je peux vous assurer que j'en ai poussé des cris à faire pâlir une groupie Twilighteuse!

John Woo! Un de mes réalisateurs préférés qui fait un film sur une des plus belles histoires que je connaisse! Même dans mes rêves les plus tordus, je n'aurais jamais imaginé que cela se produise un jour! A deux doigts de la camisole que j'étais.

Et c'est ainsi qu'après des mois d'attente. Je vais voir LE film qui résume toute une époque de ma jeunesse. Et le jour de mon anniversaire, en plus!
Il y en a qui appellent ça le hasard, d'autres une coïncidence... moi j'appelle ça le destin!

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Ca y est vous pouvez revenir, j'ai fini ma séquence "diapos-souvenirs"....
Je vais enfin parler du film lui même.

John Woo. Dernier film en date : "Paycheck", en 2003.
Ca faisait un bail que le maestro n'avait rien tourné.
Après l'échec relatif (mais commercial) de "Windtalkers, Les messagers du vent" et le falot "Paycheck", on pressentait que Woo avait fait son temps.
Bridé par les studios hollywoodiens, il décide de faire "Volte/Face" et regagne enfin ses pénates sur sa terre natale.

Grand bien lui fasse : il va pouvoir prouver au monde qu'il n'a rien perdu de sa superbe et que le cinéma chinois peut tenir tête à n'importe quelle grosse machine Hollywoodienne!

Après 30 ans de gunfights acharnés, John Woo se refait une santé mode wu xa pian, genre qu'il n'avait pas abordé depuis "La dernière chevalerie" en 1979.
Les armes à feu sont ainsi remplacées par des lames de toute sorte, ce qui n'enlève en rien au côté spectaculaire du film pour autant.


Après la sortie de la trilogie du "Seigneur des Anneaux" de Peter Jackson j'étais persuadé que le cinéma en était à son point culminant, que les scènes de bataille ne seraient jamais dépassées, que tout ce qui viendrait par la suite serait forcément de qualité inférieure.
6 ans se sont écoulés depuis "Le Retour du Roi" et plusieurs fois déjà on m'a prouvé que j'avais tort.

"Les 3 Royaumes" réitère la démonstration avec bonheur.
Cinéaste de la violence lyrique, Woo dispose pour son film d'une logistique "A toute épreuve" et de moyens techniques à faire baver les frères Scott (mais non pas la série, les réalisateurs!).

Doté d'un budget colossal de 80 millions d'euros, il s'autorise tous les excès pour donner vie à l'une des plus importantes batailles du monde chinois.
Non seulement il engage un millier de figurants(!) mais il fait construire sur place la majorité des éléments nécessaires à la reconstitution de ladite bataille.
S'il se sert habilement des images de synthèse, ce que l'on voit à l'écran est tout sauf une armada de polygones pixellisés...
La folie des grandeurs?

Le plus gros risque du film aurait été de faire un copier-coller de tout ce qui a déjà été fait des dizaines de fois. Par chance, grâce aux stratégies renversantes mises en place par les différents généraux, les scènes de bataille se suivent mais ne se ressemblent pas.
Pluies de flèches, charges de cavalerie, bombardement à coups de catapultes... le film ne recule devant rien pour nous en mettre plein la vue et parvient à se renouveler constamment.

Filmées dans des décors majestueux, ces scènes surprennent par leur démesure.
Le genre qui vous laisse essoufflé, un stupide sourire béat aux lèvres.
En un film, John Woo va jusqu'à recréer Pearl Harbour et le Débarquement.
Sans oublier que les guerriers en sous-nombre mais dotés d'une force surhumaine font irrémédiablement penser à un "300" à la sauce chinoise.
Du grand spectacle, donc.

Si la mise en scène, recherchée et stylée, de John Woo compose des images inoubliables comme lui seul sait les faire, on remarque qu'il emploie moins les ralentis (véritable marque de fabrique du cinéaste) qu'auparavant.
Ce qui ne l'empêche pas de nous offrir des plans éblouissants comme la récupération des flèches et d'apporter un véritable souffle épique, comme avec la technique des 8 trigrammes.

Et surtout, il se fait plaisir avant tout, notamment avec cette colombe, sa signature(!), qui survole la flotte ennemie en un plan séquence virtuose.

De même, la musique du film est en tout point remarquable.
Généralement assourdissante lors des grandes manœuvres, elle sait se faire douce lors de scènes plus intimistes ou encore malicieuse pour souligner le côté mutin des ruses de Zhuge Liang (voir une fois de plus la scène "comment récupérer 100 000 flèches gratos?"). Elle souligne avec panache l'ampleur des escarmouches et met en valeur l'héroïsme exacerbé des combattants.

L'héroïsme est d'ailleurs l'un des thèmes de prédilection du réalisateur.
On lui attribue souvent les titres de "cinéaste de la violence" mais c'est oublier à quel point John Woo aime ses personnages. S'il magnifie à tel point la violence dans ses films, c'est paradoxalement pour la dénoncer.
Ceux qui connaissent ses œuvres savent parfaitement que John Woo est un grand romantique.
Ce qu'il aime c'est avant tout raconter de belles histoires. D'amour et d'amitié.

Amour. L'amour entre les êtres, voilà la philosophie de celui que l'on dénonce comme étant responsable de l'ultra-violence au cinéma.
Qui peut oser dire que les histoires d'amour dans ses films ne sont pas parmi les plus belles et les plus tragiques jamais mises en scène ("The Killer", à chaque fois j'ai la larme à l'oeil, damn' it!)? Comment ne pas être subjugué, dans "Les 3 Royaumes", lorsque l'espiègle Sun Shang Xian s'effeuille en laissant apparaître un croquis du camp adverse? Comment ne pas être hypnotisé par la beauté de la courtisane de Cao Cao (Zhen Jiiiiiiiiiii!!!!!)?
Comment ne pas esquisser un frisson lorsque Xiao Quiao se jette délibérément dans la gueule du loup pour tenter de sauver son peuple?

John Woo aime les femmes et ça se voit!

Amitié. Les amitiés viriles, la loyauté, le sens de l'honneur et du sacrifice.
Un refrain que l'on retrouve dans tous ses films.
Les liens affectifs sont très forts chez les personnages, qui n'hésitent pas à donner leur vie pour "A Better Tomorrow".
D'ailleurs les personnages sont, comme dans le roman éponyme et le jeu vidéo, ultra-charismatiques!

Ceux qui ne sont pas familiers avec les protagonistes risquent de décrocher face aux nombreuses têtes et noms qu'il faudra retenir pour comprendre les enjeux de la bataille. Pour les passionnés comme moi, c'est un bonheur indescriptible que de voir ses héros favoris prendre vie à l'écran.

Soyons honnêtes, certains prennent plus de place que d'autres mais quelle euphorie d'assister à leurs exploits grandioses (Zhao Yun qui sauve le fils de Liu Bei, Guan Yu et Zhang Fei qui combattent côte à côte, Huang Gai qui prépare l'attaque par le feu...). C'est juste magique.


On reconnait que même si John Woo a cherché à respecter le plus possible les faits historiques, il se laisse parfois aller à quelques digressions.
En revanche, il a le mérite d'avoir réussi à croquer (du verbe "faire un croquis") les personnages sans perdre de temps et de manière marquante. Chacun bénéficie d'une petite scène d'introduction qui met en valeur ses principales qualités.

Ainsi un grand guerrier martial comme Guan Yu surgit d'une rangée de boucliers avant d'anéantir à lui seul toute une escouade et de se pavaner avec l'étendard ennemi, un amateur de musique comme Zhou Yu est montré une flûte à la main, tandis que Zhang Fei, tout en force brute et barbe hirsute, va jusqu'à envoyer valser un cheval d'un coup d'épaule.

Au passage, les demeurés mous du bulbe ne manqueront de faire remarquer à leur entourage la ressemblance de Zhang Fei avec un certain Chabal...
A ceux là je lève mon majeur bien haut et je citerai un Gabin bien plus éloquent que moi :

"Qu'est-ce que vous êtes venus faire sur Terre, vous n'avez pas honte d'exister ? Affreux, je vous chasse de ma mémoire, je vous balaie."

Les scènes d'action sont d'ailleurs bien représentatives du mythe que John Woo cherche à faire perdurer.
Rien d'étonnant donc à ce que ces soldats d'élite à la force surhumaine soient capables de décimer une demi douzaine de soldats ennemis d'un seul coup de lance bien placé.

En parlant des personnages, un petit mot rapide sur le casting.
Si Chow Yun Fat brille hélas par son absence (mais il aurait joué qui?), on retrouve le formidable Tony Leung, qui en est à sa troisième collaboration avec John Woo, et Takeshi Kaneshiro que l'on a pu voir récemment dans "Les Seigneurs de la Guerre".

Si la présence de ce dernier ne fait pas l'unanimité parmi les puristes, pour ma part je le trouve très appréciable dans la peau d'un Zhuge Liang astucieux mais réservé.
Les acteurs restants me sont plus ou moins familiers mais ils s'acquittent tous, jusqu'au troufion de base, de leur rôle respectif avec talent et conviction.
Un sans faute.


Mais le film n'est pas qu'une succession incessante d'affrontements musclés et sanglants. John Woo prend également son temps pour installer des séquences plus contemplatives. Le calme avant la tempête.
Loin de n' être qu'un exutoire entre deux boucheries, ces scènes ont une importance capitale dans le déroulement de l'histoire.
La guerre se joue sur plusieurs niveaux et pas que sur le champ de bataille.

Un duel de cithare, un vol de colombe ou encore la cérémonie du thé, ces minutes de répit ne sont jamais innocents et cachent un dessein plus grand que ce que l'on croit aux premiers abords.
Une tortue, un rayon de soleil ou bien une simple flammèche suffisent à ce "Messager du vent" qu'est Zhuge Liang pour concocter une série de tactiques admirables...

Ces scènes sont aussi l'occasion d'en découvrir plus sur la personnalité et les motivations de chacun. En revanche, il est vrai que cette partie est parfois sous exploitée.
Mais n'oublions pas que le film a été emputé de moitié(!) pour parfaire aux exigences du public occidental, peu habitué aux fresques en chinois sous-titré d'une durée minimale de 4h...
Il est donc plausible que les personnages soient plus approfondis dans la version longue.

Qui satis expectat, prospera cuncta videt.


Par chance, le film n'a pas été massacré par des monteurs américains pour le marché mais bel et bien remanié par John Woo lui même, à l'aide de son monteur attitré et ami de longue date, David Wu.
David Wu, dont le talent n'est plus prouver (nominé une bonne dizaine de fois aux Hong Kong Awards), confère au film une tension fascinante et un rythme effréné. Passé un prologue un peu longuet, les deux heures trente passent à une vitesse folle.
Pour une fois que "version courte" n'est pas péjoratif, on ne va pas s'en plaindre!

Ceux qui ont foncé directement au bas de l'article pour découvrir la note en premier lieu seront sûrement étonnés de voir, qu'après tant d'éloges, je ne mette pas **** au film.

C'est simple, et là ce n'est plus le fan hystérique qui parle mais l'amateur de cinéma : "Les 3 Royaumes" est excellent en tout point mais ne renouvelle pas le genre.
Visuellement éblouissant et logistiquement ahurissant, il ne reste pas moins qu'il manque parfois de souffle épique et ne se distingue de la masse (dont le récent et tout aussi remarquable "Les Seigneurs de la Guerre") que par son budget phénoménal dont John Woo peut se permettre d'employer à bon escient.

Mais même sous la torture, jamais il ne me viendrait à l'idée de me plaindre du film. "Les 3 Royaumes" c’est un rêve de gosse, rien de moins !

Quand on voit ce que les ricains nous préparent avec "Dragon Ball" (y en a qui mériteraient "Une balle dans la tête"!), je ne peux que verser des larmes de joie quand "Les 3 Royaumes" est adapté à l'écran par un Chinois pure souche! Et pas n'importe lequel surtout!
On a échappé au pire et on se retrouve avec le meilleur, que demander de plus?


Héros charismatiques, réalisation époustouflante et mise en scène dantesque, John Woo fait son retour au pays en grandes pompes et se lance corps et âme dans cette adaptation flamboyante d'une épopée légendaire.
Après une série d'échecs relatifs, commerciaux ou artistiques, du côté de chez nous, il retrouve sa verve incomparable et nous prouve, à grands renforts d'images grandioses, qu'il reste bel et bien "The Killer" dans sa catégorie.

Sur ce je vous laisse, je vais me refaire une petite partie de "Dynasty Warriors"...

Note : ***
Note : **** pour les fans de "Dynasty Warriors" :)

La guerre des mondes



Été 1954. Une météorite s’écrase près de la petite localité de Linda Rosa en Californie provoquant un début de feu de forêt. Une fois l'incendie circonscrit, le shérif de la ville fait quérir le Dr Forrester, brillant astronome et physicien nucléaire qui passe ses vacances à 20 km de là, pour connaître son avis. Arrivé sur place, le scientifique constate que le corps céleste est encore trop chaud pour être examiné, et qu'il est de plus radioactif. Le shérif décide alors de renvoyer les badauds et ne laisse que trois hommes près du cratère pour prévenir tout nouvel incendie. Restées seules, les trois vigies se retrouvent bientôt confrontées à «l'œil mécanique» qui sort de la météorite. Comme ils tentent d'entrer en communication, ils sont désintégrés par un rayon mortel. L'invasion de la Terre a commencé...



Tout a commencé lorsqu'un animateur lit un passage du roman de l'écrivain HG Wells à la radio.
Les auditeurs entendent soudainement parler d'une invasion extraterrestre.
Il paraîtrait que des soucoupes volantes armées de rayons meurtriers ont déjà rasé plusieurs villes et ne laissent aucun survivant!

Je vous laisse imaginer la terreur dans laquelle ont été plongés des centaines de personnes avant de comprendre qu'il ne s'agissait d'un simple canular...

Cette anecdote est restée célèbre dans l'histoire et il n'en fallait pas plus pour que le livre devienne un film. C'est le producteur renommé George Pal, à qui on doit « Destination Moon » et « When worlds collide », qui en prend les commandes.
Doté d'un budget impressionnant, "La Guerre des Mondes" devient donc une superproduction grandiose dont le tournage s'étalera sur deux ans.

Pour bien apprécier la valeur du film il faut se replacer dans le contexte de l'époque.

Les années 50, c'est l'après guerre. Les Etats Unis sont à la tête de l'économie mondiale et Hollywood est une industrie florissante. Mais c'est aussi, l'époque du Maccarthysme et de la chasse aux communistes. En même temps que la société de consommation grandit à vue d'oeil, la méfiance vis à vis de son voisin fait de même.
C'est aussi le début de la guerre froide et des nouvelles avancées technologiques, comme la bombe atomique que tout le monde se met à craindre.

En temps qu'exutoire, le cinéma met en scène ces peurs pour mieux les exorciser.
Sur les écrans, le rêve américain n'est plus menacé par des communistes mais par des extraterrestres.

A l'époque on voit donc fleurir des dizaines de films sur des êtres venus d'une autre planète.
"La guerre des mondes" est un de ceux là.

L'histoire est on ne peut plus basique : une série de météores viennent s'écraser sur la Terre. Chacun contient des soucoupes volantes qui, une fois sorties, vont exterminer tout ce qui bouge. Face à la menace, les hommes s'organisent.

Fidèle à son époque, le film est bourré de stéréotypes.
Le héros est un homme intelligent et courageux et l'héroine est aussi belle qu' inutile. Son rôle se résume à tomber dans les bras du héros et à pousser des cris stridents assez désagréables. De plus, en bon film américain, le rapport à la religion est présent tout le long.

Et pour ne pas changer, une fois que le reste du monde a été annihilé, les Etats Unis sont les seuls à tenir encore le coup. C'est toujours eux les plus forts!
Bel élan patriotique...

Le film lui même joue beaucoup sur les peurs primaires des américains à cette époque : que faire quand l'armée et la religion demeurent inefficaces contre l'envahisseur?

Une des premières scènes de l'attaque des extraterrestres montre un prêtre qui marche vers une soucoupe avant de se faire désintégrer.
Quand l'armée devient inutile, le recours à la bombe A devient nécessaire.
Mais quand elle aussi reste sans effet, la panique est totale.

Imaginez le public de l'époque (beaucoup plus crédule et impressionnable qu'aujourd'hui) être confronté à un être inconnu que même l'arme la plus puissante du monde ne peut arrêter et vous comprendrez pourquoi le film a eu une telle réputation en son temps.


Il faut reconnaître que le film a beaucoup vieilli et qu'aujourd'hui certaines scènes font plus rire que frémir ( la scène où le Martien descend dans la maison..).
La faute à des maquettes un peu trop visibles et des effets de désintégration assez risibles.

Le plus gros reproche c'est sûrement ces images d'archives dont le réalisateur use et abuse quand il veut montrer un tank ou des canons en action.
Non seulement, elles sont trop facilement reconnaissables (la pellicule est abîmée à ces moments là) mais ce sont souvent les mêmes(!) qui repassent.

En revanche, la mise en scène est plutôt bien exploitée. Les explications scientifiques pullulent et sont tout à fait plausibles, les acteurs sont convaincants (le couple principal reste assez charismatique malgré tout) et le réalisateur sait créer une ambiance prenante.

Le prologue qui fait défiler des vidéos des deux guerres mondiales laisse place à des images de la Terre vue de l'espace et d'autres planètes.
Lorsque les extraterrestres lancent une attaque mondiale, les images de destruction et d'exodes se multiplient et sont intelligemment placées en fond alors que les soucoupes sont filmées au premier plan.

Même si l'effet reste facile, il ne perd rien de son efficacité.

Le design des soucoupes est légendaire. Quant à la photographie, elle ajoute énormément à la présence angoissante des Martiens.
Les lueurs spectrales, les lasers aveuglants, les éclairages colorés et la spectaculaire explosion atomique font partie du meilleur de ce que le Technicolor de l'époque pouvait offrir.

Mais c'est la fin qui retient le plus l'attention.
Le héros court dans des rues totalement désertes, des émeutes éclatent, les gens se battent et fuient dans tous les sens.
On se frappe sans retenue, on cherche désespéremment un véhicule pour fuir le plus rapidement.
Pendant ce temps, les soucoupes survolent la ville semant la destruction et le chaos.

A ce moment là, les maquettes sont moins visibles. Les bâtiments s'enflamment et tombent en morceaux. Les explosions impressionnent, magnifiées par des effets sonores assourdissants.
On a réellement l'impression d'assister à la fin du monde!

Plus de 50 après, ces images demeurent toujours aussi stupéfiantes et on comprend pourquoi le film a reçu l'oscar des meilleurs effets spéciaux.

Malgré son coup de vieux, le film mérite l'indulgence.
Il ne faut pas oublier qu'en 1952 l'homme n'avait pas encore mis le pied sur la Lune et que ni "2001" ni "Star Wars" n'existaient.
HG Wells et le réalisateur ne pouvaient donc se baser que sur des références extrêmement limitées.

La Guerre des Mondes est considéré comme l'un des plus fabuleux film de science-fiction de tous les temps.
On ne compte plus les films contemporains qui lui font encore référence ("Mars Attack" et "Independence Day" pour ne citer qu'eux).

Rien de plus normal qu'un des plus grands réalisateurs de notre temps ait décidé d'en faire un remake...

Note : ***

Silkwood




Karen Silkwood travaille dans un laboratoire de traitement nucléaire. Les cas de contaminations se multiplient et Karen tente de savoir quel danger réel représente la manipulation de plutonium.
Mais la direction de l'entreprise met tout en oeuvre pour l'empêcher de découvrir la vérité.



Inspiré de l'histoire vraie de Karen Silkwood, le film met en scène les dangers de la radioactivité sur le corps humain dont ses implications avec le cancer.
Karen est interprétée par Meryl Streep, qui livre une fois de plus une performance exceptionnelle.

A ses côtés on trouve le toujours impeccable Kurt Russel et la chanteuse Cher.
Si l'on ne s'étonne même plus du talent des deux premiers, Cher nous en met plein la vue.
Non pas qu'elle en fasse des tonnes, au contraire son personnage de lesbienne paumée est sidérante de crédibilité. Méconnaissable, jamais l'actrice n'aura paru aussi naturelle et authentique à l'écran.
Son interprétation lui vaudra une nomination à l'oscar du meilleur second rôle féminin et une victoire aux Golden Globes.

Les personnages sont aussi attachants que crédibles et, en prenant le parti de les montrer sous leur meilleur jour comme sous le pire, le réalisateur n'en fait pas des stéréotypes mais bien des êtres humains, qui rient, qui pleurent mais surtout qui souffrent...
On ne peut que s'identifier à ce qui leur arrive.


Si le film est bien tiré d'une histoire vraie, il fallait un scénariste et un réalisateur dignes de ce nom pour pouvoir porter l'histoire de Karen à l'écran.
Nora Ephron, scénariste renommée de « Quand Harry rencontre Sally » concentre autant le film sur le rôle de Karen au sein du syndicat et de l'usine que sur sa vie privée. L'un comme l'autre sont particulièrement mouvementés.

En devenant la porte parole des employés du laboratoire, elle se met le personnel à dos.
Si elle se préoccupe des dangers de la radioactivité sur leur santé, les employés sont inquiets qu'elle fasse fermer l'usine et qu'ils se retrouvent au chômage à cause d'elle.
L'ambiance de camaraderie du départ dégénère rapidement et l'atmosphère malsaine qui en découle entraîne directement une paranoïa compulsive.

Quant à sa vie privée, sa volonté d'aller jusqu'au bout va entraîner des tensions avec son petit copain et l'amie qu'elle héberge.

Mike Nichols (« Working Girl ») apporte un soin particulier à la réalisation qui en devient presque dangereuse pour le palpitant, tant le film est riche en émotions fortes.
Sa mise en scène impersonelle nous plonge directement dans un univers sombre et réaliste, relayé par des décors froids (les murs blancs du laboratoire).

L'absence quasi constante de musique et les rares indices dans la narration nous empêchent de prévoir ce qui va arriver et certaines scènes n'en sont que plus choquantes.
Lorsque Karen fait sonner l'alarme pour la première fois, la scène est presque étouffante autant pour l'actrice que pour le spectateur. Quant aux scènes de douche filmées en gros plans continus, elles sont absolument effroyables.
Impossible non plus d'oublier la séquence où une équipe en combinaison anti-radiations s'engouffre dans la maison de Karen avant de la vider entièrement (la maison, pas Karen...).


Nichols ne cherche jamais l'esbrouffe visuelle.
En se contentant de laisser tourner la caméra lorsque les acteurs sont à l'écran, il réduit les effets de montage au minimum et imprègne au film un côté aussi dur que poignant.

Nominé 5 fois aux oscars (meilleur actrice, meilleur second rôle, meilleur montage, meilleur scénario, le film est autant un pamphlet virulent contre les industries inconscientes et irresponsables face aux dangers, dus à la manipulation des énergies radioactives, qu'un thriller terrifiant interprété par un trio d'acteurs remarquables .
Malgré quelques longueurs, « Silkwood » est un film qui secoue, dans le bon sens du terme.

Note : ***