vendredi 25 mars 2011

Paul



Depuis 60 ans, Paul, un extraterrestre, vit sur terre et collabore avec le gouvernement américain. Il se cache à l'abri des regards dans une base militaire ultra secrète... Hélas pour lui, maintenant que le gouvernement américain lui a soutiré toutes les informations intéressantes sur la vie extraterrestre, il décide de se débarrasser de lui. Paul réussit alors à s'échapper et tombe nez à nez avec deux adolescents attardés fans de science-fiction qui sillonnent les États-Unis en camping car. Paul les convainc de l'emmener avec eux et de l'aider à quitter la terre.


Après une astucieuse relecture des films de zombies (« Shaun of the Dead ») et un film d'action invraisemblable - mais vrai - (« Hot Fuzz »), les joyeux drilles du cinéma geek Simon Pegg et Nick Frost reviennent chambouler vos zygomatiques, en s'attaquant cette fois à la science fiction avec « Paul ». Si certains peinent encore à croire à l'existence de la vie sur une autre planète, on peut affirmer que les extraterrestres ont déjà colonisé le cinéma, sous des formes diverses et variées, depuis bien des lustres. Les poilus, les baveux, les grands, les petits, tout, tout, tout vous saurez tout sur les E.T. Depuis le temps qu'ils se ramènent sur nos écrans, on pourrait croire que le genre peine à se renouveler et que le public ait fini par se lasser mais avec la véritable invasion qui nous attend cette année (« Battle Los Angeles », « I am number 4 », pour ne citer qu'eux), il semblerait que la (sou)coupe soit loin d'être pleine.

Si la plupart du temps, les films présentent des aliens belliqueux, prétexte à des scènes de destruction à grand spectacle, il arrive parfois que ces derniers fassent moins de dégâts et soient plus affables et drôles, comme le mythique E.T du film éponyme. De même, avec « Paul », Pegg et Frost s'aventurent moins dans le registre du film catastrophe que dans la comédie bon enfant. Quand on est de grands enfants. Car si « E.T » est un adorable compagnon de jeux pour nos chers bambins, Paul serait plus proche du coloc qui passe son temps à roupiller sur le canapé en se grattant le derrière, et à fumer un joint au réveil. Autant dire que le film s'adresse à un tout autre public que celui de Spielberg.

En effet malgré une apparence classique (petit, gris, grand yeux), Paul n'a rien d'un alien conventionnel. Il s'est d'ailleurs particulièrement bien intégré à la société moderne et ne refuse jamais une cigarette ou un beignet. C'est bien simple, on jurerait Seth Rogen dans « Pineapple Express » et « En cloque mode d'emploi ». Rien d'étonnant puisque c'est justement l'acteur qui lui prête sa voix, reconnaissable entre mille. Le comportement du personnage est d'ailleurs tellement proche de celui de Rogen qu'en écoutant Paul parler on a parfois l'impression de voir l'acteur à l'écran. L'un à la voix, l'autre le physique, ensemble ils forment un personnage charismatique et attachant qui risque bien de devenir un incontournable de la SF aux côtés de E.T. Pour des raisons différentes, bien entendu.

Mais Paul n'est pas la seule star du film. Les inséparables geeks Pegg et Nick forment un couple... d'inséparables geeks. On sent qu'ils sont totalement à l'aise dans leur univers et qu'ils s'amusent comme des petits fous. Un plaisir communicatif. Mais la vraie surprise du film vient des rôles secondaires. Entre un vieux fanatique qui ne cesse de citer la Bible, sa fille qui s'initie à un langage moins... châtié, des agents du gouvernement complètement timbrés, des rednecks homophobes ou encore une vieille femme retirée à la campagne qui cultive son « herbe » , le film rassemble une vraie bande de gais lurons farfelus mais attachants avant de les lancer à la poursuite des uns des autres dans une ambiance délirante de road movie à l'ancienne.

Assez surprenant pour ce genre de film, la qualité de l'écriture surprend constamment. Les dialogues sont hilarants et les bonnes répliques fusent. Hormis les -rares- moments dramatiques, l'humour est toujours au rendez vous et promet de franches tranches de rigolade. Entre Paul au comportement très (trop?) humain et Clive et Gramme qui ont l'impression de s'être perdus sur une autre planète, la définition d'"alien" prend un tout autre sens. Et malgré le nombre impressionnant de protagonistes impliqués dans l'affaire et une volonté farouche de constamment placer des références aux grands titres du cinéma de SF, le film ne semble jamais s'égarer en chemin et reste concentré sur le script. En ce qui concerne les références elles mêmes, le danger aurait été d'en faire l'intérêt majeur du film et de construire l'intrigue autour, à la matière d'un « Scary Movie ». Ici, elles sont généralement subtiles (ce qui est encore plus valorisant quand on les reconnaît) et parfaitement intégrées à un scénario qui se déroule sans temps mort. Les clins d'oeil intelligents abondent et on appréciera surtout les caméos de deux légendes du cinéma de SF qui prennent un malin plaisir à démolir leur propre image...



Pour leur troisième film en commun, les deux compères Pegg et Frost n'ont rien perdu de verve jubilatoire. Joussif de bout en bout, « Paul » est à la fois un superbe hommage à la culture geek, une belle et touchante histoire d'amitié, et un road movie frappadingue. Seth Rogen excelle dans la composition vocale de Paul et une floppée de seconds rôles bien gratinés assurent de passer un très bon moment. Pour peu que vous soyez réceptif à ce genre d'humour. Un film de geeks, fait par des geeks, avec des geeks, pour des geeks. Mais pas que.

Note : ***