samedi 2 mai 2009

Le Monde Perdu



Quatre ans ont passé depuis le désastre de Jurassic Park. Sur Isla Sorna, une île déserte avoisinant celle d'Isla Nublar, vivent d'autres dinosaures. Afin de renflouer la compagnie InGen, Peter Ludlow, neveu de John Hammond et homme d'affaires cupide, projette de monter une expédition qui ramènerait des dinosaures herbivores. Ces derniers peupleraient un nouveau parc dans la ville de San Diégo. Soucieux de préserver l'île, Hammond, récemment démis de la présidence d'Ingen, sollicite Ian Malcolm, rescapé de Jurassic Park, pour qu'il prenne la tête d'une équipe qui étudierait le comportement des dinosaures dans leur environnement. Sur place, les deux groupes vont d'abord s'affronter avant de s'unir face au danger majeur que représente la faune de l'île...



1993, Steven Spielberg explose le box office en mettant en scène les dinosaures les plus réalistes jamais vus sur un écran.
1996, il remet le couvert!

« Le Monde Perdu » est donc la suite du film « Jurassic Park » mais c'est aussi l'adaptation du roman homonyme du célèbre écrivain Michael Crichton, lui même suite directe de son premier roman (toujours « Jurassic Park »)...vous suivez?


Soyons honnêtes, le premier film, brillantissime, se suffisait à lui même.
Le seul intérêt de cette séquelle est d'engranger un max de pognon avant que la série ne s'essouffle. Autant éviter tout suspense et couper court à la conclusion évidente qui s'impose : oui, « Le Monde Perdu » est inférieur au premier film. Voilà c'est dit.
Même le grand Spielberg ne peut pas toujours réussir son coup. Le film est-il mauvais pour autant? Loin de là!

Si « Jurassic Park » reste un modèle du genre aussi bien au niveau de la tension de certaines scènes, que de la maîtrise de la narration, « Le Monde Perdu » est plus une série B à gros budget qui s'assume.


Spielberg, qui n'a rien tourné depuis 3 ans, apprend donc que Crichton se lance dans la suite de son best seller et décide de travailler en coordination avec lui afin de le mettre en scène une fois terminé.
Il a conscience de l'attente grandissante du public et sait que chacun dans sa tête a déjà fait son propre film (c'est le cas de le dire).
Ne pouvant pas satisfaire tout le monde, il prend en compte de garder les ingrédients essentiels qui ont fait le succès du premier opus tout en intensifiant l'humour, l'action, les dinosaures...bref ce qui fait l'intérêt d'une suite.

On retrouve donc le personnage de Ian Malcolm, joué par le trop rare Jeff Goldblum, en route pour un second tour de manège, avec en prime sa petite amie ( rayonnante Julianne Moore), sa fille et deux ou trois autres casse-croûtes en sursis.
Parmi eux, on appréciera les débuts de Vince Vaugh, dans un registre plutôt inattendu.
Quand on pense que par la suite il deviendra le partenaire de Owen Wilson et Ben Stiller dans d'innombrables comédies...

Du côté des seconds rôles, on est aussi bien gâtés : si le riche excentrique John Hammond (Richard Attemborough) fait une amusante mais courte apparition, Peter Stormare et l'excellent Pete Postlewaite se prêtent admirablement à l'aventure. Postlewaite est vraiment charismatique et il arrive sans peine à voler la vedette aux plus connus. Quant à la fameuse scène avec Stormare elle met assez mal à l'aise : vous ne regarderez plus un poulet de la même façon...

Voilà tout ce petit monde lâché en pleine cambrousse avec plein de machoîres acérées qui leur en veulent. Et ce sera tout pour le scénario.
Si avec son roman de plusieurs centaines de pages, Crichton peut se permettre d'étoffer les situations, Spielberg n'a que deux heures devant lui et il doit remplir son cahier des charges, tant au niveau de l'action que des effets spéciaux. L'histoire vient donc au second plan : avec autant de personnages à l'écran, impossible de travailler la personnalité de chacun alors on dispose quelques signes distinctifs ici et là pour tenter de les différencier.



Mais trève de bavardage, les stars du film se sont les dinosaures non?
Si dans « Jurassic Park », ces derniers étaient incroyablement réalistes, ici on passe au cap supérieur. Non seulement les images de synthèses ou l'animatronique les rendent terriblement convaincants mais les effets sonores (leurs cris entre autres) leur crée une « personalité » unique. On est loin du gloubiboulga de synthèse de Peter Jackson ("King Kong") où tout le monde se ressemble plus ou moins...

Mais ce qui surprend le plus c'est leur intéraction avec le décor et les acteurs. L'équipe technique de Michael Lantieri, Stan Winston et Dennis Murren a accompli un boulot absolument stupéfiant.
« Le Monde Perdu » offre en plus une bonne dizaine de nouvelles espèces de « reptiles sauriens » : les Stegosaures, Triceratops et autres Compsognatus prennent littéralement vie devant nos yeux!

En parlant de l'équipe technique, il faut signaler que Spielberg travaille avec les mêmes personnes depuis un bout de temps. C'est donc sans surprise que l'on retrouve entre autres Janus Zaminski à la photographie, Michael Khan au montage, John Williams à la musique (qui nous gratifie d'une bien belle ambiance safari) et David Koepp au scénario.
On ne s'étonne même plus de l'impeccable travail effectué par la fine équipe, tant au niveau visuel que sonore. Seul le scénario pêche parfois par excès de zèle...



Pour parler du film lui même maintenant, pour l'apprécier il faut le prendre comme une grosse série B qui ne se prend pas au sérieux. « Le Monde Perdu » est en effet un savant mélange de frisson et d'humour qui n'a qu'un but (à part remporter le pactole) nous faire passer un bon moment.
Spielberg dit : « Ma grande priorité a toujours été le public. Pour « Le Monde Perdu » j'ai avant tout voulu plaire au public ».

Ian Malcolm devient donc un émule d'Indiana Jones et de ses fameuses « one-liners » (qu'on peut traduire par « répliques qui tuent »!). Malcolm est constamment en train de râler et de faire son cynique, il n'a qu'une envie c'est se tirer de là le plus vite possible et il le fait explicitement savoir.
Jeff Goldblum est visiblement ravi de retrouver son personnage et nous de rire aux éclats chaque fois qu'il lui arrive une tuile.


Parce que le suspense a beau être présent, voire pesant (la scène du ravin), on a rarement peur pour les héros vu qu'ils peuvent distancer un T-Rex à la course et traverser des fenêtres comme si elles étaient en sucre glace.
Et puis chaque fois qu'un type se fait croquer, la scène est toujours un poil comique (le type qui va pisser, celui qui reste collé sous la semelle du T-Rex, l'autre qui reste là à crier pendant qu'un Vélociraptor s'apprête à lui bondir dessus, l'idiot du village et son serpent...).

Le film joue d'ailleurs sur une ironie assez sadique dont le personnage d'Eddie Carr fait les frais : le pauvre type aura tous les malheurs su monde à sauver ses amis avant de se faire bouffer misérablement dans sa voiture (voiture-Carr, humour) sous prétexte que le minuscule bout qui dépasse de son fusil s'est coincé dans un filet et qu'il ne peut pas l'utiliser à bon escient. C'est vraiment pas de bol...

Bref, Spielberg prend bien soin de relâcher l'ambiance avant de rentrer dans le vif du sujet.



En revanche, il multiplie avec un bonheur non dissimulé les séquences d'action pure, comme la magnifique chasse dans la plaine ou l'attaque dans le camp où l'on apprend que les jeeps ça vole vachement plus haut qu'on pense...
Sans oublier la célèbre séquence à San Diego!

Là, Spielberg est dans tous ses états et multiplie les références faciles mais toujours réjouissantes : si le titre « « Le Monde Perdu » est certainement un hommage au roman de Sir Arthur Conan Doyle, le T-Rex qui hurle dans la nuit est un clin d'oeil évident à « King Kong ». Et que dire de ce plan où des hommes d'affaires japonais détalent dans les rues en criant face à la caméra comme dans les vieux « Godzilla »...
La scène avec le bus est géniale et Spielberg ne sauve même pas le chien à la fin!

Bref Spielberg, en grand enfant, s'amuse et ne cherche qu'à nous faire prendre notre pied.



Vu comme ça on pardonne les rares fautes de goût (LA scène de gymnastique et le coup de « Maman il y a un dinosaure dans le jardin ») et les incohérences dues à une mauvaise adaptation du roman par faute de temps ou de moyens
(dans le roman on comprend que les membres de l'équipage ont été tués par des raptors embarqués, dans le film on nous fait gober que le T-Rex, du haut de ses 6 mètres, s'est faufilé dans la cabine de contrôle, a croqué tout le monde en prenant bien soin de laisser une main accrochée bien en évidence au gouvernail avant de retourner tranquillement à l'arrière afin de mieux digérer...).



Si « Le Monde Perdu » ne satisfera pas toutes les attentes, il faut reconnaître qu'il est bien joué , souvent très bien filmé et qu'il bénéficie d'effets spéciaux hors pairs.
Site B, série B. C'est ce qu'il faut se dire. En comprenant ça, on voit le film sous un autre angle et on prend un vrai plaisir à suivre les aventures de Malcolm le cynique et de ses joyeux compagnons.

Note : ***

Mulan




Mulan est une jeune chinoise, fille unique d'une famille noble. Lorsque la guerre éclate avec les Huns, menés par Shan Yu, une homme est réquisitionné dans chaque famille pour défendre le pays. Afin d'éviter à son père malade de partir au combat, Mulan décide de prendre sa place en se faisant passer pour un homme.
Si l'on découvre sa véritable identité, sa famille sera déshonorée et elle, exécutée...




Inspiré d'un poème chinois, "Mulan" est le 54ème long métrage d'animation de Disney. Si les traditions chinoises jouent un rôle important avec notamment des thèmes comme l'honneur, le sacrifice de soi et la place des femmes dans la société, "Mulan" porte définitivement la patte Disney.
Sur la même lancée que "Hercules" sorti un an plus tôt, le film s'approprie le sérieux de la culture et de la mythologie chinoise pour arroser le tout d'un humour irrévérencieux très appréciable : le père de Mulan se retrouve à prier entouré de poules qui picorent et le dragon protecteur de la famille devient un lézard de poche aussi bavard que maladroit.

Mulan est une fille aussi charmante que raffinée et c'est d'autant plus drôle de la voir se transformer en vrai goujat quand elle se fait enrôler dans l'armée. Elle fait connaissance avec de vrais idiots, bagarreurs mais loyaux, et surtout avec le beau Shang, capitaine des troupes.
De son entraînement laborieux jusqu'au dénouement sans surprise, on prend plaisir à suivre ses aventures, d'autant que Mushu et le criquet porte bonheur qui l'accompagnent font office de partenaires de choc. Si ce dernier ne parle pas, Mushu lui ne s'en prive pas pour donner son avis sur tout et surtout pour donner des conseils plus ou moins avantageux pour Mulan.
Doublé avec brio en français par José Garcia et en anglais par Eddy Murphy, le personnage de Mushu est une boîte à rire sur pattes et chacune de ses interventions donne l'occasion de se poiler un bon coup.


Comme souvent chez Disney, le méchant subit une attention particulière et Shan Yu possède un design parfait. Mélange idéal entre un Conan asiatique et un vampire assoiffé de sang, son visage est aussi effrayant que charismatique. Son rôle est résumé à celui de simple brute mais son apparence seule suffit à déclencher l'engouement. Dommage qu'il n'apparaisse pas plus souvent à l'écran...


La réalisation n'est pas en reste est s'offre même une scène de bataille aussi impressionnante que brève : la charge dans la montagne, savant mélange de 3D et de dessin traditionnel, est certainement le morceau de bravoure du film.


Bien que l'ambiance soit souvent à la légèreté, l'émotion est bien présente, véhiculée par une mise en scène inspirée et une musique magnifique.
Comme tous les classiques de Disney, "Mulan" contient son lot de chansons plus ou moins entraînantes dont "I'll make a man out of you" et le final ("True to your heart") en sont le point d'orgue.

Quant à la musique, pas de Alan Menken ("Aladdin", "la Petite Sirène") ou de Hans Zimmer ("Le Roi Lion") sous la main mais Jerry Goldsmith fera l'affaire.
Avec plus de 100 musiques de film à son actif, Goldsmith reste l'un des compositions les plus célèbres du cinéma.
Majestueuse, épique et dépaysante, la musique de "Mulan" vient rejoindre la vingtaine de nominations aus oscars qu'il a reçu durant sa carrière.




Héros (héroïne, pour l'occasion) naïf, épreuves à surmonter, chansons, histoire d'amour, morale facile, émotions, combat final entre le bien et le mal et bien sûr humour : le cahier des charges Disney est respecté à la lettre.
"Mulan" n'atteint pas les cimes d'un "Roi Lion" mais reste un très bon dessin animé pour petits et grands. Un divertissement de qualité.

Note : ***

Boulevard de la mort



Stuntman Mike sillonne les routes en tuant les femmes qu'il trouve sur son chemin. Pour cela il a une méthode bien particulière : il se sert uniquement de sa voiture.




Le nouveau film de Quentin Tarantino.
Les grands fans de « Pulp Fiction » et de « Kill Bill » seront probablement déçus de la part de l'enfant terrible du cinéma qui revient moins en forme que d'habitude.
Mais il faut connaître l'histoire du film pour mieux le comprendre.

Au départ Quentin Tarantino et Robert Rodriguez avaient l'intention de faire chacun un film rendant hommage aux sérials des années 70, des films violents et gores, sans scénario ou presque, avec pour personnages principaux des loubards charismatiques ou des bombes à grosse poitrine.
Leur projet prend forme et s'appelle « Grindhouse ».
Le segment réalisé par Rodriguez est « Planet Terror » et celui de Tarantino s'appelle « Boulevard de la mort ».
Chaque film ne dure qu'une heure et va donc a l'essentiel, se concentrant sur l'action pure.

Malheureusement, en passant par la case "commercialisation européenne", les réalisateurs décident d'exploiter chaque film séparément : chacun tourne alors des scènes supplémentaires pour atteindre une durée minimale d'1h30, voire 2h en ce qui concerne le segment de Tarantino.

1 heure supplémentaire de quoi? De dialogues interminables entre poufs vulgaires qui s'éclatent à énumérer leur conquêtes amoureuses et les positions qu'elles aimeraient essayer. Les scènes arrivent comme un cheveu sur la soupe et monopolisent quasiment la moitié du film.
Ces dialogues ne renforcent même pas la personnalité des héroines et ne rajoute certainement pas de l'intérêt au scénario déjà minimaliste...

Voilà pour le gros point noir du film.


Passé cette déception, on retrouve un Tarantino pur jus qui se fait plaisir avant tout.

« Boulevard de la mort » est pour ainsi dire un pot pourri de toute la culture Tarantinesque, en particulier, donc, les sérials des années 70.
Les héroines sortent tout droit d'un film de Russ Meyer, les poursuites automobiles tiennent autant de « Mad Max » que de « 60 secondes chrono » et la fin est directement tirée de « Faster Pussycat Kill Kill ».

Mais le pire c'est que Tarantino cite ouvertement les films auxquels il emprunte : entre les filles qui en parlent autour d'une bière, les innombrables affiches sur les murs et les plans remarquablement bien choisis, le film est truffé de références pour cinéphiles avertis.

Le film (la pellicule) lui même fait l'objet d'un soin particulier puisque l'image est parfois traversée par des rayures comme sur les vieux films et on a parfois l'impression qu'il manque un morceau de la pellicule. Tout ceci est évidemment volontaire : Tarantino cherche à mettre le public dans les mêmes conditions qu'il était lui, ado, lorsqu'il se gargarisait de séries B.


Tarantino ne s'arrête pas là. Le casting est à lui tout seul une mine d'or pour les connaisseurs.
Parmi les actrices, il récupère Rose Mc Gowan (« Planet Terror ») et Rosario Dawson (« Sin City ») , toutes deux égéries des films de son ami Rodriguez.

Et en parlant d'ami, qui c'est qu'on croise dans ce bar reculé? Eli Roth!
Qui est Eli Roth? C'est tout simplement le nouveau protégé de Tarantino à qui on doit « Cabin Fever » et « Hostel ». Roth n'est pas vraiment bon acteur mais ce qui compte c'est qu'il fasse une apparition dans le film de son pote.
Tout comme Tarantino lui même qui incarne...un amateur de cinéma!

Quand à Stuntman Mike, il n'est pas interprété par n'importe qui.
C'est l'acteur fétiche du maître du fantastique, John Carpenter, Kurt Russel lui même qui lui prête ses traits burinés.
L'acteur a été une grande star du film d'action pendant un certain temps mais il est pratiquement inconnu de la nouvelle génération.
En le voyant jouer cet ancien cascadeur de cinéma que personne ne reconnaît, impossible de ne pas faire la comparaison avec la carrière de l'acteur lui même.

Je l'ai déjà dit des dizaines de fois mais Kurt Russel est un de mes acteurs préférés. Il pourrait jouer une brosse à dents que j'irais quand même voir son film!
Il fait enfin son grand retour au cinéma et il est comme toujours impeccable.
On sent qu'il est HEU-REUX comme tout d'être là et on prend un plaisir indicible à le voir écraser sadiquement des pauvres décérébrées sans défense.


De la part de Tarantino, la réalisation ne surprend même pas. Léchée, soignée jusque dans les moindres détails que ce soit visuellement ou dans la bande son, le réalisateur effectue un vrai travail d'orfèvre. Chaque plan est une leçon de cinéma, chaque scène est une référence.
En tant que cinéphile boulimique, Tarantino s'amuse à partager son enthousiasme avec le public. S'il multiplie les citations et références aux films de sa jeunesse, il en profite également pour placer des clins d'oeil à ses propres films comme autant d' « inside jokes » que l'on doit reconnaître.
Par exemple, la voiture des filles dans la seconde partie est jaune avec une rayure noire. C'est évidemment une référence à la tenue d'Uma Thurman dans « Kill Bill » (qui est elle même une référence à celle de Bruce Lee).
Quant à la sonnerie du portable, elle ne vous rappelle pas un certain sifflotement bien connu?



Voilà, il y a donc deux façons de voir « Boulevard de la mort ».
La première c'est de regarder le film tel quel en profitant d'une mise en scène parfois viscérale, de la performance sans fausse note de Kurt Russel, tout en râlant sur le trop plein de dialogues parasites.

La seconde c'est de reconnaître le film comme un hommage sincère à un genre disparu, mis en scène par un réalisateur remarquablement inspiré qui prend plaisir à nous faire partager sa passion dévorante.... tout en râlant sur le trop plein de dialogues parasites.

Note : **

Géant




Au Texas dans les années 50, Bick Benedict et sa soeur Luz règnent en souverains absolus sur un immense ranch. Bick y installe Leslie, la fille d'une famille aristocratique rencontrée en Virginie, qu'il épouse sous le regard hostile de Luz et des Texans...




"Géant" c'est d'abord l'histoire parallèle entre une jeune femme de Virginie, Leslie, qui vient s'installer au Texas avec son mari Bick, propriétaire d'un ranch gigantesque et un pauvre cow boy simple d'esprit, Jeff, qui fait soudainement fortune.
Dans le film, Le Texas c'est du bétail et de la poussière à perte de vue. Un soleil accablant et une chaleur étouffante du matin au soir, rien à voir avec la fraicheur de la végétation luxuriante du domaine de Virginie.
Les hommes ne vivent que pour leurs troupeaux et se transmettent leur ranch de père en fils depuis des générations.

Mais le Texas c'est aussi le poids des traditions auxquelles on n'échappe pas, un racisme exacerbé et des mentalités bornées.
Chez eux, qu'ils le veuillent ou non, les fils doivent succèder à leur père et le rôle des femmes se limite à plaire à leur mari et à élever les enfants.
Quant au racisme, ce sont les Mexicains qui en font les frais. Ces "wetbacks" (littéralement "dos-mouillé", ils traversent la frontière à la nage pour pouvoir rejoindre les Etats Unis à la recherche de travail) sont traités comme des moins que rien. La plupart vivent dans la misère et sont emportés par la maladie dans l'indifférence générale.

A peine arrivée, Leslie va donc se retrouver confrontée à ces hommes butés et intolérants dont son mari fait partie intégrante.
Malgré tous les reproches qu'on lui fait, elle finira par donner quelques coups de pied bien placés dans la fourmilière et en femme fière et non-conformiste elle va décider d'améliorer la qualité de vie de ces immigrés, notamment en leur fournissant l'aide d'un médecin.


Entre conflits homme-femme, choc des génrations et rivalité économique, Bick subit de nombreux bouleversements moraux dans sa vie mais c'est ce qui le fera évoluer au cours du film : sa femme comme ses enfants lui font réaliser à quel point ses idées toutes faites sont étriquées.
Lorsque ses enfants naissent, il va se rendre compte que la tradition ne va pas être simple à leur faire accepter.
Son fils ne veut pas prendre la succession du ranch mais devenir médecin, quant à Leslie, elle se lie d'amitié avec les Mexicains et un cow boy qui travaillait pour Bick.

C'est là que débute la seconde histoire : celle de Jett Rink, un cow boy simplet qui par le coup du destin se voit devenir milliardaire suite à la découverte de pétrole sur son terrain.
C'est alors que les rôles s'inversent : Bick perd sa notoriété et le respect de sa famille tandis que Rink monte à la tête d'un gigantesque empire financier.
Mais les deux hommes se rendront compte que l'argent ne fait pas le bonheur....



Penchant nous un peu sur le titre. Géant. Qui est le géant du film?

Dans la première moitié du film; le géant c'est Bick qui possède un ranch de plusieurs milliers d'hectares et dont la fortune colossale le place à la tête de sa communauté. Mais dans la seconde moitié, il laisse malgré lui sa place à Jeff.
Au départ, Jeff ne cherche qu'à s'installer à son compte sur un petit terrain dont il a hérité mais le pétrole qui jaillit de son puit le propulse au rang des plus grandes fortunes. "From rags to riches" comme disent les Américains : du bas de l'échelle sociale il a gravi les échelons et a fait sa fortune.

Pourtant sentimentalement, aucun des hommes n'atteindra son but : à la fin de sa vie, Bick se considèrera comme un raté et Jeff sombrera dans l'alcoolisme et la dépression.

"Giant", ça peut vouloir dire géant OU géante et dans le film Leslie correspond bien au titre : dans un pays aux traditions bien ancrées, elle fera son possible pour faire évoluer les comportements. Elle militera pour des meilleures conditions de vie, en ce qui concerne les Mexicains, et pour son indépendance en tant que femme.

Les personnages sont donc "bigger than life" et chacun mériterait de s'approprier le titre.
Mais les géants sont autant les personnages que leurs interprêtes...

Si Rock Hudson (Bick) joue le rôle principal avec talent, il n'arrive pas à la cheville de James Dean.
Après "A l'Est d'Eden" et "La Fureur de Vivre", Dean crève une fois de plus l'écran dans la peau de Jeff Rink. Dean est considéré comme des plus grands acteurs ayant jamais existé et la personnalité qu'il insuffle à son personnage est juste extraordinaire.
Aussi sensuel que naif dans la première heure, son personnage se changera en un erzats d'un Howard Hugues excentrique, à la limite de la folie.
On ne le découvre pas à l'écran avant une bonne demi heure de film mais une fois qu'il y est, il nous fait oublier tout ce qu'il s'est passé avant.
Comparé aux autres personnages, on ne le voit pas beaucoup mais chacune de ses apparitions est un pur moment de cinéma et malgré sa courte présence, il sera nominé à l'oscar du meilleur acteur.
Sa performance à l'écran reste au delà des mots...

Malheureusement pour ce géant du cinéma, ce sera son dernier rôle : il trouvera la mort dans un accident de voiture avant la fin du tournage .


L'actrice principale est jouée par Elizabeth Taylor, considérée à l'époque comme une
des plus belles femmes du monde.
Formidable d'authenticité à n'importe quelle époque de la vie de son personnage, elle illumine le film de sa beauté.
Ses rares scènes avec James Dean sont mémorables.

Enfin, on découvre également un tout jeune Dennis Hopper qui deviendra par la suite, comme tout le monde le sait, un géant du cinéma américain ("Apocalypse Now", "Easy Rider", "Blue Velvet", "Speed"...).


Superproduction de 14 millions de dollars, le film lui même est un monument.
Il fut le plus gros succès de l'année 1956 pour la compagnie Warner.
Le film remporta l'oscar du meilleur réalisateur et 9 autres nominations dont meilleur film, meilleure musique, meilleurs costumes, meilleurs décors et surtout plusieurs meilleurs rôles et seconds rôles.

La réalisation de George Stevens parvient sans mal à se faire intimiste (les scènes de couple), solennelle(l'enterrement) et surtout grandiose (Rick qui mesure son terrain, les scènes avec le bétail...). Les décors sans fins, filmés sous un ciel majestueux, captivent par leurs couleurs éclatantes.
Portée par une musique prestigieuse et élégamment montée, la mise en scène joue sur les lumières et les caches pour se faire délicieusement poétique.



Malgré une durée intimidante (3h15 quand même!), le film est passionnnant par son histoire avant tout puis par les thèmes qu'il aborde mais il permet surtout d'apprécier les performances légendaires d'acteurs qui ne le sont pas moins .
Géant, le film l'est assurément!

Note : ****