samedi 2 mai 2009

Boulevard de la mort



Stuntman Mike sillonne les routes en tuant les femmes qu'il trouve sur son chemin. Pour cela il a une méthode bien particulière : il se sert uniquement de sa voiture.




Le nouveau film de Quentin Tarantino.
Les grands fans de « Pulp Fiction » et de « Kill Bill » seront probablement déçus de la part de l'enfant terrible du cinéma qui revient moins en forme que d'habitude.
Mais il faut connaître l'histoire du film pour mieux le comprendre.

Au départ Quentin Tarantino et Robert Rodriguez avaient l'intention de faire chacun un film rendant hommage aux sérials des années 70, des films violents et gores, sans scénario ou presque, avec pour personnages principaux des loubards charismatiques ou des bombes à grosse poitrine.
Leur projet prend forme et s'appelle « Grindhouse ».
Le segment réalisé par Rodriguez est « Planet Terror » et celui de Tarantino s'appelle « Boulevard de la mort ».
Chaque film ne dure qu'une heure et va donc a l'essentiel, se concentrant sur l'action pure.

Malheureusement, en passant par la case "commercialisation européenne", les réalisateurs décident d'exploiter chaque film séparément : chacun tourne alors des scènes supplémentaires pour atteindre une durée minimale d'1h30, voire 2h en ce qui concerne le segment de Tarantino.

1 heure supplémentaire de quoi? De dialogues interminables entre poufs vulgaires qui s'éclatent à énumérer leur conquêtes amoureuses et les positions qu'elles aimeraient essayer. Les scènes arrivent comme un cheveu sur la soupe et monopolisent quasiment la moitié du film.
Ces dialogues ne renforcent même pas la personnalité des héroines et ne rajoute certainement pas de l'intérêt au scénario déjà minimaliste...

Voilà pour le gros point noir du film.


Passé cette déception, on retrouve un Tarantino pur jus qui se fait plaisir avant tout.

« Boulevard de la mort » est pour ainsi dire un pot pourri de toute la culture Tarantinesque, en particulier, donc, les sérials des années 70.
Les héroines sortent tout droit d'un film de Russ Meyer, les poursuites automobiles tiennent autant de « Mad Max » que de « 60 secondes chrono » et la fin est directement tirée de « Faster Pussycat Kill Kill ».

Mais le pire c'est que Tarantino cite ouvertement les films auxquels il emprunte : entre les filles qui en parlent autour d'une bière, les innombrables affiches sur les murs et les plans remarquablement bien choisis, le film est truffé de références pour cinéphiles avertis.

Le film (la pellicule) lui même fait l'objet d'un soin particulier puisque l'image est parfois traversée par des rayures comme sur les vieux films et on a parfois l'impression qu'il manque un morceau de la pellicule. Tout ceci est évidemment volontaire : Tarantino cherche à mettre le public dans les mêmes conditions qu'il était lui, ado, lorsqu'il se gargarisait de séries B.


Tarantino ne s'arrête pas là. Le casting est à lui tout seul une mine d'or pour les connaisseurs.
Parmi les actrices, il récupère Rose Mc Gowan (« Planet Terror ») et Rosario Dawson (« Sin City ») , toutes deux égéries des films de son ami Rodriguez.

Et en parlant d'ami, qui c'est qu'on croise dans ce bar reculé? Eli Roth!
Qui est Eli Roth? C'est tout simplement le nouveau protégé de Tarantino à qui on doit « Cabin Fever » et « Hostel ». Roth n'est pas vraiment bon acteur mais ce qui compte c'est qu'il fasse une apparition dans le film de son pote.
Tout comme Tarantino lui même qui incarne...un amateur de cinéma!

Quand à Stuntman Mike, il n'est pas interprété par n'importe qui.
C'est l'acteur fétiche du maître du fantastique, John Carpenter, Kurt Russel lui même qui lui prête ses traits burinés.
L'acteur a été une grande star du film d'action pendant un certain temps mais il est pratiquement inconnu de la nouvelle génération.
En le voyant jouer cet ancien cascadeur de cinéma que personne ne reconnaît, impossible de ne pas faire la comparaison avec la carrière de l'acteur lui même.

Je l'ai déjà dit des dizaines de fois mais Kurt Russel est un de mes acteurs préférés. Il pourrait jouer une brosse à dents que j'irais quand même voir son film!
Il fait enfin son grand retour au cinéma et il est comme toujours impeccable.
On sent qu'il est HEU-REUX comme tout d'être là et on prend un plaisir indicible à le voir écraser sadiquement des pauvres décérébrées sans défense.


De la part de Tarantino, la réalisation ne surprend même pas. Léchée, soignée jusque dans les moindres détails que ce soit visuellement ou dans la bande son, le réalisateur effectue un vrai travail d'orfèvre. Chaque plan est une leçon de cinéma, chaque scène est une référence.
En tant que cinéphile boulimique, Tarantino s'amuse à partager son enthousiasme avec le public. S'il multiplie les citations et références aux films de sa jeunesse, il en profite également pour placer des clins d'oeil à ses propres films comme autant d' « inside jokes » que l'on doit reconnaître.
Par exemple, la voiture des filles dans la seconde partie est jaune avec une rayure noire. C'est évidemment une référence à la tenue d'Uma Thurman dans « Kill Bill » (qui est elle même une référence à celle de Bruce Lee).
Quant à la sonnerie du portable, elle ne vous rappelle pas un certain sifflotement bien connu?



Voilà, il y a donc deux façons de voir « Boulevard de la mort ».
La première c'est de regarder le film tel quel en profitant d'une mise en scène parfois viscérale, de la performance sans fausse note de Kurt Russel, tout en râlant sur le trop plein de dialogues parasites.

La seconde c'est de reconnaître le film comme un hommage sincère à un genre disparu, mis en scène par un réalisateur remarquablement inspiré qui prend plaisir à nous faire partager sa passion dévorante.... tout en râlant sur le trop plein de dialogues parasites.

Note : **

Aucun commentaire: