samedi 16 mai 2009

Butch Cassidy et le Kid



Deux pilleurs de train, dont les exploits mettent à fleur de peau les nerfs de leurs victimes, s'enfuient en Bolivie. Après une courte tentative de vie sédentaire, ils reprennent leurs activités.






En 1969, le trio gagnant de "l'Arnaque" (Robert Redford, Paul Newman et le réalisateur George Roy Hill) faisait déjà des merveilles dans ce western semi parodique.

Soleil de plomb, chevauchées épiques dans des étendues sauvages, prostituées au grand coeur, attaques de train, poursuites entre les bandits et les forces de l'ordre, fusillades...le film n'a rien à envier aux westerns de la grande époque mais ce qui fait sa particularité c'est la manière dont l'histoire est tournée.

Pour mieux le comprendre, un petit résumé historique s'impose...
Dans les années 40, l'entrée en guerre des Etats Unis correspond à une période de récession des westerns. Dans ce monde ravagé, le manichéisme typique des westerns américains n'est pas à sa place et le beau cow boy sans reproche ne convient plus.
Le public demande des héros ambigus, de plus en plus proches des méchants du film.

La guerre du Vietnam n'arrangera pas les choses. Les réflexions grandissantes sur la toute puissance des Etats Unis remettent en cause l'idéologie Hollywoodienne et le peuple refuse de suivre aveuglement les idées toutes faites du gouvernement.
Les erreurs du passé commencent à refaire surface, notamment le sort réservé aux indiens.
L'esthétique entière du Western s'en retrouve alors bouleversée et toute une série de films sera tournée pour réhabiliter les indiens, dont le point culminant sera "Little Big Man" d'Arthur Penn en 1970 (et bien sûr "Danse avec les loups" de Kevin Costner, mais pas avant les années 90...).

A la fin des années 60, le western tel qu'on le connaissait s'est donc éteint.


Bref, conscient des enjeux politiques et sociaux de son pays au moment où il tourne son film, George Roy Hill choisit judicieusement de ne pas tourner un western classique et se permet même d'innover en la matière.
Ainsi, le film sera bourré de clins d'oeil au genre. Dès les premières images, le ton est donné :

Le générique d'introduction du film est un petit court métrage tourné comme au temps du muet, faisant directement référence au premier western jamais réalisé : un film d'une dizaine de minutes dantant de 1903 nommé "The Great Train Robbery".
De plus, le réalisateur s'amuse parfois à intercaler de vrais photos d'époque au cours du film et va même jusqu'à filmer la première scène entièrement en sépia, ce qui lui permet de vieillir artificiellement le film.
Le sépia rappelle evidemment les premières photographies de l'époque où les procédés de coloration n'étaient pas encore inventés. Cette première scène met donc tout de suite dans le bain.

Heureusement malgré tout (le sépia ça lasse...), le réalisateur revient vite à nos vieilles bonnes couleurs traditionnelles et les exploite avec panache. La photographie remportera d'ailleurs un oscar.
Autant dire que les paysages sont magnifiques, rendus avec talent par une palette de couleurs éclatantes et des plans de toute beauté. On sent l'influence des plus grands (John Ford, Howard Hawks) mais pourtant Hill ajoute ce petit plus qui fait toute la différence.

S'il choisit de donner au film un aspect un peu vieillot, il décide aussi de le faire entrer dans la modernité. Combiner les deux n'était pas chose facile mais le réalisateur a relevé le défi avec brio. Aux couleurs jaunies et aux références westerniennes classiques évidentes, il ajoute des travellings avant ou arrière impressionnants qui lui permettent de suivre à la fois les poursuivants et les poursuivis, une musique contemporaine et surtout il soigne la qualité de la narration.

Si le film est aussi réussi, c'est avant tout pour le talent de conteur de Hill.
Primo, il n'utilise jamais la musique à outrance pour prévenir d'un danger imminent et on est souvent pris hors garde, secundo on n'en sait jamais plus que les personnages (la longue scène de la milice qui les poursuit est un grand moment de suspense) et tercio, il fait tout pour qu'on s'attache à eux.
Car plus qu'un western "Butch Cassidy et le Kid" est, comme son nom l'indique, un "buddy movie" et se concentre sur les aventures du célèbre duo.

Le problème majeur est justement lié à l'intérêt du duo car si la mayonnaise ne prend pas entre les acteurs, c'est tout le film qui part en fumée...
Heureusement le réalisateur a plus d'un tour dans son sac et si l'histoire est plutôt sérieuse, voire dramatique, l'ambiance, elle, est à la déconnade : des deux malfrats, pilleurs de banques et de trains à leurs heures perdues, le film en fait des compères chamailleurs qui prêtent plus à sourire qu'à frémir.

Le Butch Cassidy de Paul Newman est un gentleman charmeur et plutôt grande gueule et qui n'a "jamais tiré sur quelqu'un" et Redford, qui joue son premier grand rôle à l'écran, est sidérant de tension contrôlée.
Le Kid qu'il interprète est un as de la gachette, prêt à affronter n'importe qui, mais qui au fond est aussi râleur que son copain.
Leurs caractères totalement opposés se font évidemment complémentaires et leur amitié se ressent à chaque instant.

Le duo "Newman-Redford" fonctionne à merveille!
La complicité des deux acteurs transparait dans chaque scène et on n'a aucun mal à voir qu'il s'amusent comme des fous.
Quoi qu'il arrive, ils jouent avec plaisir les types décontractés et leur numéro sera repris comme modèle par de nombreux "buddy movie" qui suivront.

Sans oublier qu'ils effectuent eux-mêmes leurs propres cascades (pour la plupart bien sûr) ce qui donne au film une vraie crédibilité : voir Redford de face sur le toît d'un train en plan rapproché reste nettement plus impressionnant que de voir une "vulgaire" doublure de dos, en plan large...
On a vraiment envie d'être en leur compagnie et c'est ce qui fait grande force du film.

De son côté le réalisateur ne chôme pas.
Non content de filmer l'une des explosions les plus saisissantes de l'histoire du cinéma(!), il se permet d'alterner de pures scènes de comédie (la scène du vélo) avec des séquences d'une gravité palpable et grace au travail effectué sur le son et le montage, ses fusillades n'ont rien à envier à celles de Peckimpah ("La Horde Sauvage").
Quant au dernier plan du film, il est entré dans la légende...


Seul petit regret : la musique.
Se voulant moderne à l'époque, Hill a utilisé des chansons des années 70. Aujourd'hui, la bande son remet malheureusement le film dans son époque et le vieillit (dans le mauvais sens du terme cette fois). La chanson "Raindrops keep falling on my head", bien que récompensée par un oscar, n'a plus autant d'impact à l'heure actuelle et la musique de Burt Bacharach, dont la mélodie se réfère parfois aux films muets, elle aussi détentrice d'un oscar, donne au film un coup de vieux considérable.
Néanmoins, le film comportant moins de vingt minutes de musique, ce léger défaut s'oublie très vite et ne fait aucun tort au film lui même.


Pour les puristes et les historiens, le scénario s'avère parfois inexact (la fin notamment) mais honnêtement on s'en fiche...
Classé sur IMDB parmi les 150 meilleurs films de tous les temps, "Butch Cassidy et le Kid" reste une référence, tant en matière de western, que de comédie.

La réalisation (nominée aux oscars) recherchée de George Roy Hill apporte dynamisme et vitalité à la mise en scène, le scénario (oscarisé) passionnant fait la part belle à des dialogues savoureux et les acteurs sont tout simplement parfaits.
Que dire de plus?

Note : ****














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