mercredi 7 janvier 2009

Ring




Une rumeur circule dans les cours d'école : une vidéo maudite provoquerait la mort pile une semaine après l'avoir regardée... Rumeur apparemment stupide mais non moins fondée puisqu'on lui impute déjà quatre morts. La tante d'une des victimes, journaliste de profession, décide de mener l'enquête qui la mènera à une histoire de fantôme et de malédiction.

A moins d'avoir fait un séjour prolongé sur Mars ses 10 dernières années ou de vivre en ermite coupé de toute civilisation, il est impossible d'être passé à côté de l'impact cinématographique de "Ring"...

"Ring" n'est pas qu'un simple film d'horreur japonais, il est, au même titre que "Scream" pour les occidentaux, un précurseur du genre.

Son succès phénoménal est à la base d'une vague de dizaines de films d'horreur japonais ancrés sur le même principe et le film lui même a fait l'objet de nombreuses suites et parodies.

Le réalisateur Hideo Nakata était loin de s'imaginer que son film produirait un tel engouement.

En combinant la tradition des "Yurei Eiga" (à savoir les films de fantômes japonais) des années 50-60 qui adaptaient les contes et légendes populaires des fantômes chinois (retranscrits par la suite en japonais) et un univers plus contemporain, Nakata a donné naissance à la silouhette mythique de Sadako.

Avec ses longs cheveux noirs qui cachent constamment son visage, sa robe blanche et sa démarche inhumaine, elle devient l'incarnation du stéréotype de l'horreur à la japonaise.

Le fantôme de Sadako à désormais sa place parmi les "monstres" les plus célèbres du cinéma aux côtés de Dark Vador, Terminator et le tueur de Scream.

Son apparence est instantanément reconnaissbale et il n'est pas rare de voir, en Asie, des collégiennes porter des cheveux extrêmement longs et marcher la tête penchée en avant.
Mais le film a eu un impact social tellement important qu' à cause de son implication horrifique, "jouer à Sadako" est devenu strictement interdit dans les écoles comme l'explique le réalisateur dans les bonus.

De mon côté, j'étais persuadé de connaître le film après avoir vu "Scary Movie 3" qui parodie l'histoire mais j'ai eu l'occasion de le voir malgré tout, donc...

Si le scénario est effectivement connu de tous, la mise en scène de Nakata mérite largement le coup d'oeil.

Contrairement à la plupart des films d'horreur hollywoodiens qui misent tout sur la surenchère d'effets gratuits et de gore grand guignolesque, Nakata installe une ambiance sordide et pesante qui définit l'horreur sous un nouveau jour.

Pour un spectateur nourri aux scènes téléphonées et qui à l'habitude de se laisser guider par la musique pour savoir quand le tueur va frapper, "Ring" surprend constamment en prenant totalement au dépourvu.

Si le scénario peut parfois prêter à sourire (d'où les parodies) tant il véhicule des concepts un peu inhabituels pour notre culture occidentale, la réalisation sérieuse et soignée de Nakata parvient à nous tenir en haleine jusqu'à la fin.

Alors que les studios hollywoodiens dépensent parfois des millions en effets spéciaux et finissent par donner mal au crâne à force de multiplier les mouvements de caméra pour nous faire peur, Nakata s'en sort avec les honneurs avec un budget minimaliste.

Sa mise en scène épurée et glacée nous file instantanément les chocottes.
Même s'il ne se passe rien à l'écran, les angles de caméra biscornus et l'abscence de musique maintient une tension palpable qui ne nous lâche jamais.

En esthète de l'image, Nakata peaufine ses plans et crée une atmosphère troublante de chaque instant.
Il doit beaucoup à Kubrick dont il emprunte les plans fixes à la géométrie travaillée. La scène où le fils de l'héroine se promène à l'étage est d'ailleurs réminiscente de "Shining".
Tout au long du film, les personnages sont enfermés dans un cadre artificiel fait de paravents ou de couloirs étroits, symbole du destin funeste dont ils ne peuvent échapper...

De même la quasi-abscence de musique ne permet jamais de prévoir la suite des évènements et l'horreur en est d'autant plus présente.
Nakata a d'ailleurs saisi toute l'importance de l'ambiance sonore et s'en sert avec brio à son avantage...

En comprenant que la musique est quasiment le fil narratif d'un film de ce genre, il décide de l'utiliser au minimum afin de laisser le spectateur dans l'inconnu le plus total.

La musique de Kenji Kawai (spécialisé dans les films d'animation dont "Ghost In the Shell" de Mamoru Oshii") est donc plus un amas de bruitages plus ou moins reconnaissables qu'une vraie bande originale.

Ce travail sur les effets sonores vaut à lui seul son pesant de cacahuettes tant il nous met le trouillomètre à zéro!

Le film en lui même est aussi étonnant. Au lieu de plonger directement dans l'horreur, le réalisateur prend le temps d'installer ses personnages.
Le film se déroule dans une réalité palpable et la plus grande partie du film ressemble plus à une enquête policière ( la recherche minutieuse des indices, le décryptage de la K7 image par image...) qu'à un film d'horreur au sens où on l'entend.

Conscient que son scénario (une K7 tueuse...) risque d'avoir du mal à convaincre, il joue sur la crédibilité des situations et les fausses alertes.
On évite les éternelles portes qui claquent pour un rien et le chat qui bondit dans le champ de la caméra et surtout Nakata parvient à nous faire peur avec des objets du quotidien tels qu'un téléphone et un poste de télé...


Le film aurait pu s'appeler "7 jours pour mourir" et se résumer à une course éffrénée contre la montre mais...non.
Le film s'appelle "Ring" et "ring" c'est le bruit strident que fait un téléphone quand quelqu'un appelle.

Et le film porte bien son titre : le réalisateur y va très progressif dans l'horreur.
On suit les personnages dans leur petit quotidien quand soudain, Nakata nous balance une de ses images choc dont il a le secret! Et là inutile de dire que le film fait froid dans le dos!

Même si la scène mythique où Sadako sort de l'écran de télé n'est un secret pour personne, la manière dont elle est interprétée glace toujours le sang.

Au final, le film suggère plus qu'il ne montre et les images choc sont très rares par rapport à la durée du film.
Néanmoins leur exécution est parfaite en tout point et confirme au film son statut de culte.


Malgré les nombreuses suites et remakes qu'il a engendré, l'original reste une valeur sûre pour tous les fans d'horreur à la japonaise.
Hideo Nakata reste bel et bien The Lord of The Ring ! (facile...)

Note : ***

Aucun commentaire: