vendredi 13 février 2009

La Jetée



Paris, après la « troisième guerre mondiale » et la destruction nucléaire de toute la surface de la Terre.
Le héros est le cobaye de scientifiques qui cherchent à rétablir un corridor temporel afin de permettre aux hommes du futur de changer d'époque. Il a été choisi en raison de sa très bonne mémoire visuelle : il garde une image très forte et présente d'un événement vécu pendant son enfance, lors d'une promenade avec sa mère sur la jetée de l'aéroport d'Orly.


Le cinéma c'est un défilement d'images fixes à 24 images par seconde.
« La jetée » c'est un défilement d'images fixes, point.
En effet si c'est la continuité dans les images qui crée le mouvement au cinéma, du mouvement dans « La jetée » il n 'y en a pas.

Si mouvement il y a, il est avant tout engendré par les fondus enchaînés qui font le lien entre deux photos.
Photos qui défilent à un rythme hypnotique, accompagnées par la voix lanscinante du narrateur.

Pour palier à l'abscence d'animation, les images se font particulièrement expressives.
Le réalisateur assemble pêle mêle de véritables photos d'art à de simples clichés pris sur le vif, l'important étant de capturer l'essence de chaque partie du récit en en montrant le moins possible.

L'ambiance elle même est particulière : si le grain de l'image et la noirceur des arrières plans font immédiatement penser aux images d'archives de la seconde guerre mondiale, il n'est pas rare de voir des visages à moitié cachés dans l'ombre, tous droits sortis du cinéma de Renoir ou des films noirs de Melville.

Et malgré ce fond obscur qui enveloppe constamment l'image (dans les sous-sols en particulier), les personnages ne sont jamais grotesques et effrayants comme dans les films expressionnistes allemands.

Le réalisateur cherche avant tout à se démarquer du passé et à briser les conventions en représentant la réalité sous un autre jour ; symbole de la Nouvelle Vague française.

Bien que simple court-métrage, « La jetée » est une référence dans le milieu du cinéma car il a inspiré « L'armée des 12 Singes », le chef d'oeuvre de Terry Gilliam.
En connaissant les deux films, on peut effectivement remarquer à quel point Gilliam s'est approprié l'intrigue principale tout en reprenant les éléments essentiels de la narration.

Mais n'étant composé que d'une suite de diapositives, « La jetée » peut-il, malgré tout, être considéré comme un film?

La question peut se poser, comme celle de son intérêt véritable.
Car dans les faits, le scénario est aussi concis qu'implicite et le film mérite aisément une seconde vision pour être bien compris de bout en bout.

Quant à la mise en scène (si on peut aller jusqu'à l'appeller comme ça), elle ne fait jamais oublier le côté « figé » des situations.
Les images sont belles mais rarement démonstratives et seule la voix off nous autorise les explications nécessaires.

Mais cette vois off justement, particulièrement monotone, à du mal à capter notre attention tout le long.
Il arrive alors qu'on perde de vue le scénario, ne pouvant pas se raccrocher aux images, et les 30 minutes du film finissent par s'éterniser.

Court métrage français de grande renommée, « La jetée » est avant tout une oeuvre d'art à part entière.
Son esthétique déroute autant qu'elle captive et sa narration si originale ne peut laisser indifférent. Il reste malgré tout difficile d'accès en raison de son austérité extrême et peut même lasser rapidement.

Grandiose pour les uns, soporifique pour les autres, « La jetée » est moins un film qu'une expérience sensorielle unique.
Avis aux amateurs de Bella Tarr...

Note : **

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