samedi 20 juin 2009

The Rocky Horror Picture Show



Une nuit d'orage, la voiture de Janet et Brad, un couple coincé qui vient de se fiancer, tombe en panne. Obligés de se réfugier dans un mystérieux château, ils vont faire la rencontre de ses occupants pour le moins bizarres, qui se livrent à de bien étranges expériences...




Qu'est ce qu'un film culte?

D'après les historiens du cinéma, un film culte serait un film qui ne ramasse pas le pactole à sa sortie mais dont le bouche à oreille entraîne un succès innatendu.
Dans ce cas ni « Star Wars » ni la trilogie de Peter Jackson n'en feraient partie? Ah, problème... La définition se contredit.
Quoi qu'il en soit « The Rocky Horror Picture Show » donne une nouveau sens au statut de film culte : c'est un film où ce qui se passe à l'écran devient moins important que ce qui se déroule dans dans la salle de cinéma où il est projeté!
Définition assez étrange mais qui résume l'essence même de «The Rocky Horror Picture Show ».

Adapté de la pièce de théâtre à succès de Richard O brien (le majordome Riff Raff dans le film), « The Rocky Horror Picture Show » est un four à sa sortie.
Comprenez que dans les années 70, une comédie rock qui parle ouvertement de la transexualité et des « déviances » sexuelles a peu de chances de conquérir le coeur du public, attaché à des valeurs plus conservatrices.
Choqués, les gens quittent la salle avant la fin. Assassiné par la plupart des critiques, le film est un échec commercial.
Paradoxalement, c'est son échec en salles qui fera son succès!

Un an après sa sortie initiale, le film finit par être projeté au cours des fameuses « séances de minuit » et attire peu à peu un public jeune, amateur de sensations fortes.
Chez les spectateurs de cette époque, très respectueuse des valeurs traditionnelles, le film a du toucher une corde sensible car rapidement ils commencent à hurler, à bondir sur leurs sièges et à faire leurs propres commentaires et dialogues.
L'enthousiasme se répand et bientôt les gens viennent grimés comme les personnages du film et reprennent en choeur les paroles des chansons.
Plus fort que la 3D, Richard O Brien et Jim Sharman (le réalisateur) viennent d'inventer, sans le savoir, le premier film intéractif !

Son statut de culte, le film le doit donc à la complicité inattendue du public.
« The Rocky Horror Picture Show » n'est plus un film, c'est un expérience qui rassemble des dizaines de jeunes fous déjantés qui ont transmis leur passion à travers les générations...

Aujourd'hui, plus de public, plus de salle de cinéma.
On est seul ou quelques uns devant un petit écran et on regarde le film tel qu'il a été conçu à la base.
Cette nouvelle façon de regarder le film lui enlève t-elle ses qualités? Pas sûr...


Dès que la chanson «Science Fiction Double Feature » commence, on sait qu'on a affaire à un film hors du commun : sans crier gare, des lèvres pulpeuses se matérialisent sur un écran noir avant d'entonner une chanson magnifique, dont les paroles retracent les grands moments du cinéma de SF (« la guerre des mondes », « le jour où la terre s'arrêta ») et du fantastique (« L'homme invisible », « King Kong »).
Le générique à lui seul est un grand moment de cinéma et un véritable hommage au genre.


Par la suite, le film fera intervenir de nombreux morceaux de rock and roll endiablés (dont « Sweet Tranvestite » et «  The Time Warp » restent les titres phares).
Grace à des paroles drôles et originales et des rythmes travaillés, l'ambiance sonore est remarquable (si l'on aime ce genre de musique).


Mais visuellement c'est aussi du tout bon.
Le film se déroule dans un vieux manoir délabré dont la salle d'opération rose bonbon contraste à merveille avec le mobilier poussiéreux des autres pièces.
Que ce soit dans les décors ou les costumes, le souci extrême du détail impressionne constamment.

Les costumes extravagants soulignent l'intense personnalité des personnages tout en installant le film dans une mouvance des spectacles de Brodway.
Les maquillages du film, d'évidente inspiration gothique, apportent eux aussi un charme indéniable aux personnages.
Voir Tim Curry en cuir et bas résille fait toujours un effet du tonnerre!
Pour son premier rôle au cinéma, il se donne à fond dans la peau de cet androgyne excentrique.
Si incarner le personnage en aurait fait palir plus d'un, il laisse son amour prôpre au placard et se lance dans ce qui reste la plus célèbre performance de sa carrière. N'hésitant pas à prendre les postures les plus suggestives, il fait de son espèce de savant fou sexuel une véritable icône du cinéma alternatif.

Les personnages secondaires ont chacun leur particularité qui les rend si réussis : le visage un brin démoniaque d'O Brien fait toujours sa petite impression, Meat Loaf fait une apparition aussi courte que remarquée et le personnage de Patricia Quinn incarne ce qui se rapproche le plus de la succube : sexy as hell!

Le couple de Brad et Janet ne sont pas en reste non plus.
Susan Sarrandon et Barry Bostwick ont su saisir toute l'ironie des situations.
Que ce soit dans leurs dialogues ou leurs attitudes, ils prennent un plaisir jubilatoire à accumuler les répliques de série B.
Leurs personnages sont le cliché parfait du jeune couple américain de classe moyenne : Monsieur se présente d'une poignée de main vigoureuse, arbore un sourire ultrabright à faire rougir de honte un vendeur de voitures et passe son temps à s'étonner, les mains bien posées sur les hanches. Madame est folle de son mari, prude mais au final pas si ingénue que ça...
Elle, son passe temps favori c'est pousser des cris aigus, s'évanouir et se faire poursuivre en sous-vêtements comme toute héroine de vieux film d'horreur qui se respecte.

Sans oublier ce criminologiste qui intervient de temps en temps pour nous expliquer de quoi il retourne. Si au début il demeure flegmatique, il prend vite part à la folie ambiante qui règne dans le film. A le voir, en costume élégant, danser sur son bureau, il donne tout de suite au film un air Montypythonnesque bienvenu.


Les dialogues idiots sont légions mais dans la bouche des acteurs, ils deviennent instantanément cultes :
-You're wet
-Yes it's raining

ou encore l'inoubliable
-Brad?
-Janet?
-Docteur Scott?
-Janet?
-Rocky?
(à répéter trois fois)


Néanmoins, les acteurs parviennent à ne pas se laisser emporter dans la farce pure.
Les personnages, loin d'être des enveloppes vides, possèdent une personnalité parfois étonnament approfondie et malgré les situations absurdes, ce qui se passe à l'écran reste parfaitement crédible.
La mise en scène théâtrale (le film commence par un lever de rideau et de nombreuses séquences se passent sur une scène) et les effets spéciaux fauchés (les tirs de laser) ne nous empêchent jamais de nous attacher aux personnages.
On est même triste à la fin du sort réservé à certains personnages...ce qui prouve le talent des interprètes et du réalisateur à véhiculer des émotions malgré un scénario grotesque et farfelu.


Jamais Obrien et Sharman n'auraient pu prédire que leur film deviendrait un tel phénomène.
Nombreux sont ceux qui se sont essayés à percer les mystères de son succès mais « The Rocky Horror Picture Show » n'est pas un film qui s'analyse, c'est un pur divertissement qui s'apprécie en tant que tel.
Plus de 30 ans après, le film n'a rien perdu de sa superbe.
Kitsh? Assurément! Mais grâce à son ambiance unique et ses costumes intemporels, le film ne subit même pas la marque de son époque.
Le film est pratiquement sans défaut!
Hormis une fin qui traîne en longueur (même un des personnages baille...), il reste un grand spectacle musical, particulièrement élaboré et brillament interprété.



Hommage à la fois aux films d'horreur et de science fiction, thriller amusant et insolent, série B assumée, comédie musicale de mauvais goût (lui aussi assumé), film kitsho-érotique à scandale... « The Rocky Horror Picture Show » est un classique du cinéma qui ne ressemble qu'à lui même.

L'aventure commence par un petit saut à gauche...puis un pas à droite!

Note : ***

Aucun commentaire: