vendredi 14 novembre 2008

Ca tourne à Manhattan





Une journée de tournage comme une autre...

"On n'est pas au cinéma" , "arrête de te croire dans un film!"
Oui mais si le film devenait la réalité et la réalité devenait le film?

Le film débute sur des plans en noir et blanc, grain à l'image.
On sent le cinéma amateur à petit budget façon Clerks de Kevin Smith.
On nous présente sommairement le réalisateur, les actrices, le caméraman et le chef opérateur. C'est plutôt bien filmé pour de l'amateur avec belle lumière et profondeur de champ.
Le réalisateur lance quelques conseils sur le tas, et Moteur, Action!

Et là surprise, le film qu'ils tournent est en couleurs alors que la réalité filmée est en noir et blanc...(même moi je m'y perds!).

Passé cette excellente surprise, le réalisateur (le vrai) s'amuse en mettant des micros dans le cadre, en foirant les prises de sons, la netteté de l'image...
Le réalisateur (le faux) de plus en plus exaspéré finit littéralement par piquer une crise en insultant toute son équipe sous pretexte qu'un bip bip intenpestif l'empêche de tourner.

Et boum! Deuxième surprise, le bruit gênant en question n'est autre que son réveil! Il est dans son lit et la réalité est cette fois en couleur.

Plus tard, le film (le faux) mettra en scène une scène de rêve beaucoup moins réaliste ...

Et voilà, le réalisateur passe son temps à nous lancer sur une fausse piste avant de brutalement renverser la donne.

Malgré son aspect minimaliste assumé le film (le vrai) regorge de qualités.
Pour commencer la réalisation est bluffante au sens propre, elle nous fait pénétrer différents univers à travers celui du cinéma.

La mise en abime du film dans le film a été exploitée plusieurs fois au cinéma (Séquences et conséquences, Inland Empire et Muholland Drive et même Boogie Nights avec l'univers du porno.) mais au lieu de simplement présenter les déboires d'une équipe de cinéma ou de plonger dans l'horreur de l'illusion qui s'incruste dans la réalité, le réalisateur (Tom DiCillo) joue sur la technicité de la création cinématographique.

Il s'accapare l'image en jouant sur les stéréotypes visuels.

La scène où le couple se déclare son amour est tournée dans un magnifique noir et blanc épuré des années 50 alors que lorsque une actrice, larmoyante, annonce à sa mère que son père la battait, les couleurs se font plus vives pour ressembler à une série télé pour ménagères en manque d'affection comme on en voit tous les jours.

Mais quand la réalité du tournage prend le pas sur le film (le faux), c' est à exploser de rire!

La vie sentimentale se mêle à la vie professionnelle, ce qui nous donne droit à des situations incongrues comme la séquence ou l'acteur censé joué le tombeur romantique se fait salement insulter par l'actrice qui lui donne la réplique au lieu de réciter son texte, et lui de jouer son rôle comme si de rien n'était.
L'équipe technique est constituée de bras cassés et les petites contrariétés de chacun ne font qu'augmenter la température interne du pauvre metteur en scène.

Le casting est absolument génial.
Les acteurs doivent jouer une équipe de cinéma et donc pour la plupart jouer leur propre rôle à l'écran.
Les vrais acteurs sont aussi bons que leurs avatars sont mauvais.
Chacun est impressionnant de naturel et forme une joyeuse bande des personnages typiques que l'on trouve sur un plateau de cinéma.

J'ai voulu voir le film avant tout parce que j'adore Steve Buscemi.

Habitué aux personnages décalés, un peu en dehors de la réalité (Armageddon, Fargo, The Big Lebowski, Big Fish et tant d'autres), il incarne un réalisateur indépendant qui essaie tant bien que mal de garder le contrôle sur son film.

Sa prestation est juste parfaite. Il passe de la douceur à la folie en quelques secondes.
Mais malgré l' exaspération grandissante de son personnage, il n'essaie jamais d'en faire trop.
Son réalisateur n'est pas une caricature, c'est un être humain compréhensif avec de vraies émotions et de vrais problèmes à résoudre.
Alors après avoir hurlé sa rage à qui voulait l'entendre, il se remet calmement à réfléchir pour trouver une solution.
L'oeil rivé sur ses acteurs, on sent la passion le submerger quand, au bout d'innombrables prises, il réussit enfin à filmer la scène tant désirée.

A la fin de la journée, tous ces tracas et prises de becs s'oublient et s'effacent à travers le regard des personnages lors de la magnifique et émouvante scène de la prise de son silencieuse. Mais demain, tout recommencera...


L'envers des coulisses nous est présenté de manière aussi ingénieuse que réaliste et porté par des acteurs incroyables de simplicité.
Tom Dicillo (scénario et réalisation) réussit une comédie décapante mais juste sur l'univers du cinéma.
Son monde du cinéma est celui des relations humaines.
La personnalité et les sentiments des membres de l'équipe technique transparait sur le plateau.
Le cinéma, c'est aussi la vie de tous les jours...

Un vrai bonheur pour les cinéphiles de tous poils!

Note : ***

Aucun commentaire: