dimanche 4 octobre 2009

The Buddy Holly Story




Buddy Holly débute sur la scène de la patinoire de Ludbrock au Texas. Mais qui voudrait d’un rocker binoclard comme lui ? Même ses producteurs l’incitent à chanter de la country sirupeuse plutôt qu’un rock’n roll déchaîné.
Pourtant, le miracle s’est produit : à Nashville, dans une salle réservée aux Noirs, Buddy Holly remporte un succès considérable. Le premier…




Aujourd’hui, si l’on parle du rock’n roll des années 50 en Amérique, des noms tels que Jerry lee Lewis, Johnny Cash ou encore le King Presley viennent automatiquement à l’esprit. Celui de Buddy Holly moins. Pourtant, Charles Hardin Holley n’est rien de moins que l’un des pionniers du rock’n roll, dont la force créatrice et les innovations musicales auront inspiré des groupes au rayonnement planétaire, à savoir Les Beatles et les Rolling Stones.
Pourquoi alors le nom de Buddy Holly n’est-il pas aussi populaire que ses confrères ?

Eh bien, en réalité, il l’est. D’ailleurs, bon nombre de musiciens lui rendent hommage dans leurs chansons (dont le magnifique « American Pie" de Don McLean).
Mais c’est sa très courte carrière et sa médiatisation moins prononcée que d’autres artistes qui l’ont rendu méconnu du grand public.
Ce film donne l’occasion de se rattraper en (re)découvrant un artiste au talent aussi immense que sa carrière fut brève.


Au cinéma, le biopic (film biographique) n’est jamais sans danger.
Premièrement, comme il est impossible de raconter une existence entière en deux heures de film, le réalisateur et le scénariste doivent procéder à des choix cruciaux à propos de ce qui va être retranscrit à l’écran et ce qui ne va pas l’être.
Deuxièmement, retracer la biographie de quelqu’un de manière la plus exacte possible ajoute le risque de changer le film en « simple » documentaire.
De même que privilégier le jeu des acteurs sans se soucier de la mise en scène apportera hélas un côté monotone et poussif qui portera un coup fatal au film, éclipsant par là même toutes ses qualités.

Steve Rash, le réalisateur de « The Buddy Holly Story », évite avec adresse ces trois obstacles et nous offre un grand moment de cinéma.
En se concentrant uniquement sur la carrière du groupe, il nous plonge directement au cœur du sujet sans passer par une présentation des protagonistes qui n’aurait fait que ralentir le film.
De même, le film se termine à la mort du chanteur. Pas d’épilogue, pas d’enterrement funèbre, rien.
Le scénario a le mérite d’être aussi concis que bien construit et ne part jamais dans des divagations inutiles. L’alchimie entre les acteurs est palpable et les situations ne semblent jamais téléphonées. Quant aux dialogues, ils sonnent vrais, supportent de réelles émotions et sont souvent particulièrement drôles, ce qui rend les personnages terriblement attachants.
On accroche d’autant plus à l’histoire et on prend un réel plaisir à suivre les pérégrinations du groupe. Rien à redire.


En revanche, ceux qui auront à redire sont ceux qui remarqueront toutes les incohérences du film, comparées à la vie réelle de l’artiste. Mais il ne faut pas oublier que « The Buddy Holly Story » est un film avant d’être un documentaire, et donc par nature une fiction. Que certains détails sans importance réelle aient changés ne gênent en rien à la compréhension du film et le fait que d’autres éléments aient été modifiés pour rendre certaines scènes plus captivantes sur grand écran ne peut engendrer qu’un retour positif.
Comme on dit : « quand la légende est plus belle que la réalité, imprimez la légende ».


Le quatrième piège du biopic réside évidemment dans l’interprétation.
Un acteur trop consciencieux risquera de passer un temps fou à observer puis à reproduire chaque mimique, chaque geste de la personne qu’il incarne pour une meilleure authenticité. Le résultat sera celui d’une poupée de cire, sans âme, figée dans ses expressions comme dans ses mouvements.
En revanche un acteur plus informel se contentera d’appliquer à sa gestuelle une certaine ressemblance à son modèle sans pour autant réussir à se cacher derrière son interprétation.

Il faut donc un travail considérable à un comédien pour parvenir à un juste milieu entre une totale personnification de son modèle et une certaine marge de liberté dans son interprétation.
C’est l’exploit que l’acteur Gary Busey relève avec un talent indéniable.
Eternel second rôle d’excellents films d’action (« Point Break », « Predator 2 », « Soldier »), son large sourire psychotique l’a souvent cantonné dans la peau de méchants tueurs, comme dans « l’Arme Fatale ».
C’est d’autant plus étonnant que Busey a débuté sa carrière au cinéma derrière le visage angélique de Buddy Holly...
En tant que Buddy il est juste parfait. Non seulement il imite à merveille le personnage qu’il incarne mais dans le film c’est lui-même qui chante et joue de la guitare.
L’acteur, méconnaissable derrière ses culs de bouteille, s’est investi dans son rôle à 100% et sa prestation enfiévrée lui vaudra une nomination aux oscars en tant que meilleur acteur.

Le reste du casting est lui aussi exemplaire.
Aux côtés de Busey, on trouve Don Stroud et Charles Martin Smith (« American Graffiti ») qui jouent les amis et partenaires de Buddy Holly. Tout comme les autres acteurs qui interprètent des musiciens dans le film, les deux comédiens jouent et chantent réellement lors des concerts et répétitions.
Les séquences musicales sont donc d’un réalisme à toute épreuve.

En parlant de la musique, elle joue évidemment un rôle primordial dans le film et ce n’est pas moins d’une douzaine de morceaux que l’on aura le plaisir d’écouter, tout en admirant la formidable prestation de Gary Busey.
Les chansons vont du romantique « True Love Ways » à l’entêtant « That’ll be the day », en passant par le guilleret « Every Day » et c’est un bonheur sans cesse renouvelé que de voir l’acteur disparaître derrière sa performance.
Si Busey ne sera « que » nominé, la musique du film, elle, remportera un oscar bien mérité.


Mais il arrive toujours un moment où le film doit s’arrêter.
Le temps s’est écoulé sans se faire voir et c’est déjà la fin du concert, et de l’histoire par la même occasion. Ici, la fin apparaît brutale, sans concession.
Le choc est d’autant plus rude que la vie de l’artiste s’est réellement achevée de manière aussi violente et abrupte.
Et c’est les yeux embués de larmes que l’on regarde le générique défiler en maudissant « the day the music died »…



« The Buddy Holly Story » retrace -plus ou moins- fidèlement la carrière d’un des plus grands rockers de son temps. En évitant l’écueil de la biographie monotone et froide, le réalisateur nous livre de superbes séquences riches en émotions, rythmées par des titres inoubliables. Le sourire aux lèvres, la larme à l’œil et la musique dans le cœur, on reste pantois devant la performance d’un Gary Busey qui n’a jamais été meilleur de toute sa carrière.
Un jeune musicien est mort. Une légende est née.

Note : ****

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