vendredi 5 juin 2009

Les lois de l'attraction



Dans une université, aux Etats Unis, quatre étudiants tentent d'assouvrir leurs fantasmes sexuels : Lauren, habituée aux déceptions sentimentales, s'éprend, comme Lara sa camarade de chambrée, de Sean, tandis que Paul, un étudiant bisexuel, cherche à obtenir les avances d'un garçon qui les lui a déjà refusées à plusieurs reprises.





Avec un résumé pareil, on pouvait s'attendre à un gentil mélodrame dégoulinant de bons sentiments, une comédie pour ados à la « American Pie » ou carrément un pilote pour une nouvelle série à la mode. Tout.
Tout, mais pas ça!


Il y a des films qui vous emportent corps et âme sans que vous sachiez exactement pourquoi. Est-ce le scénario, la mise en scène, le jeu des acteurs? Impossible de savoir ce qui attire autant dans « Les lois de l'attraction » mais une chose est sûre, on reste littéralement scotché à l'écran, incapables de quitter le film des yeux.

Pas étonnant quand on sait que le scénariste et réalisateur n'est autre que Roger Avary, à qui on doit le scénario du cultissime « Pulp Fiction ».
Adapté du roman de Bret Easton Ellis, « Les lois de l'attraction » est plus qu'un simple film sur les déboires amoureux d'une bande de jeunes, bien plus.
Mais encore une fois, difficile d'exprimer clairement ce que l'on ressent en voyant le film.

Il faut reconnaître avant tout la qualité du scénario, basé sur des relations plutôt complexes, et la finesse d'écriture des dialogues. Il n'est pas rare d'entendre les monologues intérieurs d'un personnage durant une scène entière. Ils se livrent à coeur ouvert au spectateur alors qu'il leur est parfois impossible de faire le premier pas dans leurs histoires de couples.

« Les lois de l'attraction » bénéficie de nombreuses similitudes avec le chef d'oeuvre de Tarantino, à commencer par une mise en scène qui ne respecte pas un ordre chronologique.
Si Tarantino découpait chaque scène explicitement, Avary use et abuse des séquences tournées à l'envers.
Le passage pré-générique est un modèle de perfection dans ce domaine, où à chaque présentation d'un nouveau personnage, le film remonte littéralement le cours du temps jusqu'à montrer la scène d'un autre point de vue.
Le procédé n'est certes pas nouveau, mais aussi bien maîtrisé, il laisse pantois d'admiration.


Avary prend d'ailleurs un malin plaisir à casser les codes de la mise en scène conventionnelle grace notamment à l'utilisation de l'écran scindé, où deux personnages qui se parlent s'adressent en réalité à la caméra.
Ou encore ces séquences oniriques, où l'on voit simultanément ce que les personnages font et ce qu'ils fantasment de faire...

Il s'autorise également un jusqu'au boutisme que peu se seraient permis.
Entre un voyage en Europe raconté à la manière d'une « Auberge Espagnole » sous acide ou ce suicide dans une baignoire, véritablement choquant, (je défis quiconque de regarder la scène sans avoir un haut le coeur ou de faire une grimace...), Avary développe un style particulier qui se moque éperdument des tabous.
Pour autant, on n'assiste jamais à une surenchère de scènes d'orgies, de violence injustifiée et de vulgarités gratuites comme on pourrait imaginer.
Avary se concentre avant tout sur son scénario, noir mais férocement drôle, et sur la façon dont les relations entre les personnages s'enchevêtrent dans tous les sens.



Le second point commun entre les deux films c'est des dialogues jubilatoires et un casting absolument parfait. Tout au long du film, on retrouve la patte crue et fleurie du scénariste de « Pulp Fiction ».
Le film regorge de petites pépites qu'il est difficile d'apprécier sorties du contexte (je ne chercherai donc pas à en citer quelques exemples) mais qui garantissent de sacrés éclats de rire!

En revanche, pour ce qui est du casting, si « Les lois de l'attraction » ne bénéficie d'aucune pointure à opposer aux comédiens de « Pulp Fiction », chaque acteur incarne son personnage à la perfection, à commencer par James Van Der Beek (« Dawson »), charismatique en diable et incroyablement crédible dans la peau du psychopathe à retardement.
De même, on pourra se régaler des moues coquines et de la plastique aguicheuse de Jessica Biel et Shannyn Sossamon et de l'interprétation complètement déjantée du reste du casting.
Mention spéciale à l'acteur qui joue Richard/Dick dont la prestation courte mais mémorable restera longtemps dans les annales...


Enfin, quand on pense à « Pulp Fiction », on ne peut passer à côté de titres comme « Mirsilou » et « Girl, you'll be a woman soon » ; je parle évidemement de la bande son. Et pour ce qui est de créer une ambiance unique, Avary est vraiment un dieu dans son domaine.
La BO de « Les lois de l'attraction » est un petit bijou de passion et de fantaisie.
Les morceaux choisis mettent parfaitement en valeur le côté à la fois farfelu et exalté des situations et se veut aussi entrainant qu'éclectique.
De Blondie, à George Michael en passant par le « I can't live without you » de Harry Nilsson jusqu'à oser du Serge Gainsbourg(!), rarement bande son aura été si détonnante!

La mise en scène, hypnotique, captive jusqu'à la fin du film, qui malheureusement se termine un peu en queue de poisson...
Seul défaut notable (même s'il paraît que le livre se termine ainsi également) pour une oeuvre qui surprend, séduit et passionne constamment.

Encore un film pour les jeunes (enfin 16 ans minimum, vaut mieux) qui fonctionne sur la recette efficace « Sex, drugs and rock n roll », mais malgré les apparences, « Les lois de l'attraction », se place bien au dessus de la masse des comédies américaines pour ados.



Des protagonistes perturbés et shootés comme dans « Trainspotting », une bande son racée et des répliques savoureuses à la « Pulp Fiction », un univers réaliste basé principalement sur les relations sexuelles qui rappelle « Boogie Nights », une mise en scène décalée mais étonnament soignée et une violence crue et réaliste qui emprunte autant à Oliver Stone qu'à de Palma...
Le film de Roger Avary est un amalgame de tout ce qui a déjà été fait et refait des dizaines de fois, alors justement pourquoi est-il si bon?
La question n'a pas de réponse et c'est aussi ce qui fait son charme indéfinissable. Culte!

Note : ***

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