dimanche 26 avril 2009

Jeepers Creepers



Les vacances d'été sont enfin arrivées et, comme chaque année, Trish et Darry, deux étudiants, frère et soeur, prennent la route pour rendre visite à leurs parents. Sur le chemin, un routier agressif emboutit l'arrière de leur voiture sans raison apparente.
Quelques kilomètres plus loin, Trish et Darry revoient le même camion, à côté d'une église abandonnée. Ils aperçoivent le conducteur, entièrement vêtu de loques, qui jette un corps dans une canalisation. Malgré les protestations de Trish, Darry veut en avoir le coeur net. Dès que la voie est libre, il va voir et s'engage dans le conduit. Il va y faire une découverte terrifiante...



Après avoir vu « Peaceful Warriors » je me suis enfin décidé à voir les « Jeepers Creepers » du même Victor Salva.

Le film commence de façon très classique : un couple d'adolescents roule sur une route de campagne perdue au milieu de nulle part.
La première bonne surprise c'est qu'ils sont frères et soeurs, on évite donc l'éternel cliché des deux tourteraux qui partent à l'aventure.
La seconde c'est que leur personnalité est particulièrement fouillée. On sent tout de suite une vraie complicité entre eux et ils se révèlent aussi attachants que crédibles.

Le frère Darry est joué par Justin Long qu'on a pu voir (et apprécier) dans « Admis à tout pris », « Dodgeball » ou encore « Die Hard 4 ». Un excellent comédien bien au dessus de la masse qui peuple les films pour ados.
Darry est un simple étudiant et n'a rien du macho sportif et beau gosse habituel pour un premier rôle.

Quant à sa soeur, interprétée par Gina Phillips, elle échappe à l'étiquette « blonde écervelée » pour devenir une jeune adolescente au caractère bien trempé.
Pas de machisme mal placé ici, non seulement elle ne passe pas son temps à pousser des cris stridents face à la caméra mais elle est de surcroît forte et pleine de ressources.

En tant que frère et soeur, ils se chamaillent, se racontent des blagues, prennent soin l'un de l'autre...on est immédiatement convaincu des liens qui les unissent et on s'identifie à eux dès les premières secondes.


En apparence, rien ne distingue le film des autres slasher movies qui peuplent les écrans pourtant on se rend vite compte que l'on n'a pas affaire à un film ordinaire.
Le réalisateur prend le temps d'installer ses personnages dans un suspense implacable avant de distiller des pointes de frayeur quand on s'y attend le moins.
On aime les deux personnages parce qu'ils n'essaient jamais de faire des choses déraisonnées.
Les situations n'en sont que plus convaincantes et c'est justement parce qu'on se dit qu'on se comporterait pareil dans le même cas que l'horreur devient si choquante.


Salva est passé maître dans l'art de nous maintenir sous pression.
Le film assimile les moments d'angoisse à de véritables références cinéphiliques à tel point qu'on ne peut jamais prévoir ni la forme, ni le motif de l'agresseur.
Il commence à leur rentrer dedans avec son camion (« Duel » de Spielberg), puis on découvre qu'il s'agit d'un sadique qui se terre dans un coin abandonné ("Massacre à la Tronçonneuse") et qui se se sert de cadavres pour refaire sa tapisserie (les murs recouverts de corps gluants font penser à « Alien ») .
Par la suite, il s'amuse à trancher les têtes à coup de hache (« Sleepy Hollow » de Burton) avant d'en faire son repas.


On a d'abord le sentiment d'avoir à faire à un fou du volant puis à un serial killer expert en redécoration de bâtiment avant d'opter pour « psychopathe cannibale à tendance nécrophile ».
Et pourtant, on a tort. D'apparence humaine, le « Creeper » est bien plus que ça...


Dans les grandes lignes, le scénario est très classique mais la patte de Salva fait toute la différence.
Non content d'installer une ambiance terrifiante qui nous prend les tripes dès la première confrontation, il construit une mise en scène aux petits oignons surprenante à bien des égards.
La véritable apparence du tueur ne sera dévoilée que dans le dernier quart du film ce qui oblige Salva à le garder dans l'obscurité pour le reste du temps.
Ce qui marchait à merveille pour « Alien » est aussi efficace ici : en ne nous laissant percevoir que le strict nécessaire, Salva nous tient constamment en haleine avec un budget réduit.
Il démontre avec talent qu'une mise en scène appliquée vaut tous les effets spéciaux du monde!


Mais le génie de Salva est de ne pas se reposer sur les acquis et d'innover sans cesse. Ce n'est pas parce qu'on ne voit pas le « Creeper » que l'on n'en prend pas plein les mirettes. Têtes tranchées, coeur arraché, corps cousus ensemble...si le film y va progressif dans l'horreur, une fois que Salva en a décidé, il ne nous lâche plus.

De plus, il joue à merveille sur les effets de surprise. Il évite la facilité et plutôt que de faire claquer les portes pour un rien, il préfère couper le courant pour plonger une pièce dans le noir le plus total.
Il surprend aussi en utilisant la profondeur de champ de façon innatendue.
Au lieu de filmer bêtement les attaques du « Creeper » en une série de plans rapprochés, il le fait intervenir en arrière plan.

Quant à la bande son, elle ne se contente pas de soutenir l'action. Si la musique de Bennet Salvay est assez classique et va crescendo laissant deviner quand le « Creeper » va frapper, les vieilles chansons qui passent à la radio ou sur un tourne disque apportent un côté décalé au film et un humour bienvenu.
Certaines scènes sont d'ailleurs empreintes d'un humour très noir qui ne laisse pas indifférent et c'est une bonne chose qu'en dépit des situations cauchemardesques, le film ne se prenne pas trop au sérieux.


En terme d'innovation, il faut saluer le design du « Creeper ».
Vêtu d'un ample manteau, hache à la main, il rappelle le « marin vengeur » de « Souviens toi l'été dernier ». A ceci près que « Souviens toi » n'est qu'une daube opportuniste surfant sur le succès de « Scream »...
Mais alors que la plupart des serial killers sont d'une lenteur presque inconcevable, le « Creeper » est d'une agilité surprenante malgré sa taille imposante et il redouble de vivacité quand il s'agit de tuer. Il entre ainsi au panthéon des « méchants » du cinéma les plus charismatique du genre.



Salva ne fait pas dans la demi mesure. Une fois le décor posé, le film ne nous laissera pas reprendre notre souffle avant le générique de fin. Le réalisateur laisse au vestiaire stéréotypes, politicalement correct et happy end et le plan final risque de hanter les plus sensibles pendant longtemps...



Avec « Jeepers Creepers », Victor Salva réinvente le fantastique, rien de moins.
Il nous offre un modèle de peur et de sadisme qui va faire date.
Imprévisible, intelligent et innovant à la fois, « Jeepers Creepers » est une vrai claque dans la figure pour tous les amoureux des films d'horreur.

Note : ***

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