samedi 10 octobre 2009

New York 1997




En 1997, Manhattan est devenu une immense prison ghetto.
Victime d'un attentat, l'avion du président des Etats Unis s'écrase en plein dans la ville. Snake, un dangereux criminel, est chargé de partir à sa recherche en échange de sa grâce. Parachuté en plein coeur de Manhattan, il dispose de 24 heures, au bout desquelles une micro-bombe greffée sur son cerveau explosera...




Après le terrifiant film d'horreur « The Fog », John Carpenter change totalement de registre pour s'adonner à la science fiction d'anticipation.
Plus qu'un thriller, « New York 1997 » est un grand film d'aventure, mis en scène avec justesse et intelligence.

Pour ce film, Carpenter a pris un gros risque car, en adoptant un sujet de base qui nécessite un budget important, il doit parvenir à ses fins avec des moyens bien plus réduits. Adepte de la débrouille et du système D, le cinéaste réussit malgré tout à réaliser un film cohérent et visuellement crédible avec un peu de jugeotte et un formidable travail de mise en scène.

Par exemple, n'ayant pas l'argent suffisant pour filmer un crash d'avion, il se contente de nous le montrer par l'intermédiaire d'un écran d'ordinateur.
Les mêmes écrans serviront par la suite à représenter les vues aériennes de New York alors qu'un planeur survole la ville.
En économisant ainsi sur ces scènes en apparence plus coûteuses, Carpenter peut se permettre d'utiliser son budget autrement, notamment au niveau des décors.

Et ce n'est pas peu dire que les environnements de « New York 1997 » sont parmi les plus impressionnants jamais vus au cinéma. La Grosse Pomme n'est plus qu'un bidonville géant où s'entassent détritus et carcasses de voitures.
La nuit, les quartiers délabrés ne sont plus éclairés que par les flammes laissées par quelque cocktail molotov. Les résidents qui s'y trouvent ne sont que des loubards ghettoisés, sans état d'âme, assoiffés de sang et de violence.
Leurs seuls plaisirs, en dehors du sexe et des drogues, reste le théâtre, pour les rares illuminés qui l'apprécient encore, et les combats de gladiateurs.

Et pour le coup, Carpenter s'amuse à recréer l'ambiance nerveuse de la Rome antique en la transposant dans un monde futuriste, ce qui n'enlève en rien à la sauvagerie des combats.
Avec l'aide de son célèbre directeur de la photo, Dean Cundey, Carpenter élabore des images sophistiquées, sublimées par des éclairages menaçants et une ambiance malsaine à souhait.
Grand maître du suspense, il joue habilement sur les zones d'ombre et les silences angoissants afin de maintenir une tension constante. Le danger de cet univers carcéral dans lequel on se retrouve plongé est tangible et plus qu'un simple décor, la grande cité en ruines acquiert une vraie personnalité jusqu'à se placer au même niveau que les protagonistes.


Protagonistes joués une fois n'est pas coutume par des habitués de Carpenter, dont Donald Pleasance ("Halloween", « Prince des Ténèbres ») dans la peau d'un président hautain et antipathique et la belle Adrienne Barbeau (« The Fog »), au caractère bien trempé. Parmi les nouveaux venus, le film fait la part belle à Isaac Hayes, imposant leader des prisonniers et Lee Van Cleef (« Le bon, la brute et le truand ») en comissaire déloyal et sournois.

Mais le vrai héros du film c'est bien sûr Snake Pliskin interprété par le toujours génial Kurt Russel, qui joue l'un de ses premiers grands rôles.
Russel, qui reste certainement l'acteur fétiche de Carpenter (au moins quatre films ensemble à leur actif), campe ici l'un des personnages les plus connus et les plus charismatiques du réalisateur. Charisme rehaussé par les remarquables compositions de Carpenter, qui signe, avec le thème principal du film, l'une de ses meilleures mélodies.

Pliskin n'est pas un héros américain classique comme on se l'imagine.
Il n'a rien du flic chargé de la protection du président : c'est un criminel qui ne cherche qu'à obtenir sa liberté. Il n'est mû par aucun élan patriotique mais doit accomplir sa mission afin de survivre à une mort programmée par ses commanditaires eux mêmes...
Instinctif et brutal, il ne possède pas non plus cette morale typique des grands héros hollywoodiens et pour lui, quiconque se met en travers de sa route est une cible à abattre. C'est donc bien à un anti-héros peu commun et anticonformiste à qui l'on a affaire.

Ce hors-la-loi légendaire (sa réputation le précède) deviendra par la suite une importante source d'influence pour bon nombre de cinéastes et même le japonais Hideo Kojima, l'illustre créateur du jeu vidéo « Metal Gear Solid », reprendra le personnage en hommage au film. Preuve que le talent de Carpenter ne connait pas de frontières...


Une fois n'est pas coutume, malgré ces indéniables qualités, « New York 1997 » est un four à sa sortie. Le public américain n'appréciant pas d'être si ouvertement critiqué, cette version cynique et satirique de la société mise en scène par Carpenter est loin d'être au goût de tous. De plus, le film sortant à l'époque du scandale du Watergate, l'image que l'on y fait du président est loin d'être flatteuse, ce qui n'encourage pas le public à aller voir le film...
C'est souvent ça le problème avec Carpenter : des films excellents mais qui sortent à une période qui ne correspond pas aux attentes du public et qui se soldent par des échecs commerciaux.


Le film a beau avoir vieilli, il n'en reste pas moins d'actualité : un avion, une tour, un crash...
Et si les sceptiques considèrent que la date des évènements (1997) n'est désormais plus crédible du tout, pensez simplement à Kubrick et à son « 2001, l'Odyssée de l'Espace ».


Partant avec un scénario basique et un budget minimaliste, Carpenter parvient à créer des décors post apocalytiques sidérants de réalisme, sublimés par une mise en scène brut de décoffrage pour nous livrer l'un de ses films les plus marquants visuellement.
Le personnage de Snake Pliskin deviendra au fil du temps une icône du cinéma de genre et « New York 1997 » demeure le seul film dans la carrière de Carpenter qui connaîtra une suite.


Note : ***

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